[PORTRAIT] Samuel Gassmann, créateur de boutons de manchette de luxe à Paris

undefined 28 février 2024 undefined 10h45

Auriane Camus

Il y a des vocations qui ne s'inventent pas, comme celle de Samuel Gassmann. Car si on s'imagine aisément devenir bijoutier, coiffeur, céramiste ou boulanger, on s'imagine un peu moins devenir créateur de boutons de manchette. C'est pourtant devenu le quotidien de cet artisan parisien depuis bientôt 15 ans.


De la pige à l'artisanat

Après de longues années sur les bancs de la faculté en histoire de l’art, Samuel devient pigiste dans plusieurs médias à l’image d’Arte ou du Journal de la culture. À 27 ans, alors qu’il produit un reportage sur les boutons de vêtements, il découvre un univers qu’il qualifie de « complètement dingue » : « Je me suis rendu compte qu'il y avait des boutons de jour, des boutons du soir, des bouton négligés, des boutons de sport, des boutons d’apparat… Et tout ça respecte des lois somptuaires », explique-t-il. Tout un monde dont il va vite se passionner.

© Maël Bouvier

Un jour, il rencontre Diane Nédélec-Bellevenue, conservatrice et directrice du musée de la Nacre, qui lui propose de filmer la production de plusieurs boutons. Fasciné par la beauté de ces petits pions de nacre, il en prend plusieurs dizaines chez lui, qu’il transforme en boutons de manchette à l’aide d’un peu d’huile de coude et de quelques fils de soie en guise de liens. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais Samuel fait la connaissance d’une célèbre maison de chemise sur-mesure, qui se trouve place Vendôme. Son dirigeant est intéressé par les boutons de manchette du pigiste et se met à les vendre dans sa boutique.

La machine est lancée : quelques jours après, le magazine ELLE consacre un article aux créations de Samuel, tandis qu’un bureau d’achat international lui propose de l’aider à lancer sa marque pour vendre des boutons de manchette dans le monde entier. « Ce qui est dingue, c’est que je n’avais aucune passion ni pour les métiers d’arts, ni pour les boutons de manchette avant ça », avoue-t-il.


Des boutons de manchettes vendus dans le monde entier

15 ans plus tard, après quelques années à exercer dans son salon puis dans les locaux de l’Institut National des métiers d’art, Samuel a fait de cette découverte son métier et crée désormais des boutons de manchette dans son atelier-boutique de la rue Charlemagne. Avec deux collections par an autour d’un thème précis, des clients provenant du monde entier (notamment des États-Unis et du Japon) et des commandes sur-mesure, autant dire que l’artisan est bien occupé.


© Maël Bouvier

Aujourd’hui, Samuel travaille principalement ses boutons avec de la nacre, son matériau de prédilection, mais s’amuse également à découvrir de nouvelles matières et méthodes de travail à chaque nouvelle collection : « Tous les ans, je m'amuse – ou je me prends la tête – à essayer d'apprendre une nouvelle technique. Cette année, sur la feuille d'or, j'ai travaillé avec une des spécialistes de la feuille d'or qui m'a donné un cours pendant une semaine ici », explique-t-il.

Et le résultat est franchement au rendez-vous. Pour sa première collection de l'année, présentée au mois de janvier 2024, le créateur a décidé de travailler sur la lumière en s'inspirant notamment des arcs-en-ciel, des miroirs, des constellations, des vitraux, des éclipses, etc. Il a par exemple réalisé plusieurs séries de boutons de manchette, à l'aide de la technique du cyanotype, une méthode d’impression photographique mettant à profit la lumière du soleil pour produire des images de couleur bleue très caractéristiques de la technique. Samuel Gassmann s'est également lancé dans la création de quelques bijoux — comme des bracelets, des bagues, des alliances ou même quelques porte-clés — toujours avec la même idée de travailler de nouvelles techniques. 


© Maël Bouvier

Comptez à partir de 160€ pour vous offrir l'une de ses créations, avec un prix moyen en-dessous des 300€ et des pièces dépassant parfois les 1000 ou 2000€. Une somme qui n'est, certes, pas à la portée de tous, mais qui semble pourtant modique quand on voit tout le travail qui se cache derrière chaque pièce. Sans oublier que le créateur n'utilise que des matières nobles : or, argent, bronze, platine, parfois même avec des incrustations de diamants ou autres pierres précieuses. De véritables morceaux de luxe mais attention, pas de place pour le bling-bling ici : Samuel est un adepte du « luxe discret » — un concept très français selon lui — et surtout très attaché à toute la tradition qui entoure la mode des boutons, la faute à ses études en histoire de l'art probablement.


© Maël Bouvier

Pour le rencontrer, vous pouvez vous rendre dans son atelier-boutique rue Charlemagne, mais plus pour très longtemps : d’ici quelques semaines, l'artisan devrait dire au revoir au Village Saint-Paul pour s'installer juste en face du Bon Marché, dans le 6e.


Samuel Gassmann

1, rue Charlemagne – 4e
Tél. : 01 77 32 63 27
Ouvert du mardi au vendredi de 11h à 19h et le samedi de 15h30 à 19h

Insta : @samuelgassmannparis
samuelgassmann.com