Focus sur la bouleversante rétrospective du photographe James Nachtwey

undefined 13 juillet 2018 undefined 15h50

Tiana Rafali-Clausse

Je ne vais pas y aller par quatre chemins. L’exposition Memoria, photographies de James Nachtwey à la Maison Européenne de la Photographie n’en est pas une comme les autres. Les clichés qui habillent les murs des deux étages supérieurs de l’hôtel particulier classé « ne sont pas des œuvres d’art mais des témoignages », du propre aveu du photographe de guerre. Pas de story fancy ou de jolis souvenirs à placarder sur vos réseaux sociaux. Jusqu’au 29 juillet, l’Américain de 70 ans nous montre la vraie vie et pire encore.


D’emblée, la disposition brute, sans légende, des photos, interpelle. « C’est un parti pris artistique de ne pas légender les clichés », explique la co-commissaire, Laurie Hurwitz.

« L’idée est de livrer les photographies brutes pour que le spectateur se plonge dedans, qu’il soit au cœur de l’action et se rende compte des horreurs accumulées depuis 40 ans. Le photographe tente de provoquer une une réaction viscérale qui va au-delà du langage, que le public rencontre les protagonistes des clichés. Les photos se racontent en elles-mêmes et nous confrontent à la réalité. Cette triste réalité : les hommes sont capables du pire mais en y étant confrontés, peut-être que ça nous incitera à protester ».

 Afghanistan, Kaboul, 1996 © James Nachtwey Archive, Hood Museum of Art, Dartmouth

Guerre, agent orange, famine, catastrophe naturelle, maladie, exode… Au fur et à mesure de la visite, on se surprend à avoir peur des recoins des grandes pièces de l'exposition. 139 photographies et une grande installation de 60 images prises en Irak « dans une tentative de (me) rapprocher de la réalité » suffisent à nous bouleverser. On ne sait pas quelles atrocités vont nous sauter au visage à la prochaine photo, alors on avance à tâtons, doucement, l’œil fuyant.

 New York, 2001 © James Nachtwey Archive,
Hood Museum of Art, Dartmouth

C’est l’objectif du reporter. James Nachtwey est persuadé que son travail peut changer le monde, grâce au pouvoir de l’image. « Il est là pour montrer la souffrance des autres, parler des autres », rapporte la commissaire.

 Bosnie-Herzégovine, Mostar, 1993 © James
Nachtwey Archive, Hood Museum of Art,
Dartmouth

Il a ainsi aidé cette famille pauvre d’Indonésie à s’éloigner des rails de train où était construite leur cabane. Il a fait bouger les ONG après le tremblement de terre à Haïti. Il a été blessé en Irak par une grenade et a photographié le carnage jusqu’à ce qu’il s’évanouisse. Dans un seul but : nous montrer l’horreur et que ça ne se reproduise plus.

Si seulement.


Memorial, photographies de James Nachtwey

Maison Européenne de la Photographie
Jusqu’au 29 juillet
5/7, rue de Fourcy – 4e