Décidément, 2024 aura été une année décisive pour le monde de l’art. Après les 150 ans de l’impressionnisme à Orsay un peu plus tôt cette année, c’est au tour du surréalisme de fêter son centenaire. Pour l’occasion, toutes les figures majeures du mouvement se retrouvent rassemblées au Centre Pompidou jusqu’au 13 janvier 2025, dans une exposition qui se veut aussi spectaculaire qu’innovante. On a eu la chance de la visiter, et voici ce qu’on en a pensé.
Voir cette publication sur Instagram
Un surréalisme… pas si extraordinaire
Dès le départ de l’exposition, le ton est lancé. Cette rétrospective sera aussi surréaliste que le mouvement qu’elle met en lumière. Imaginée comme un véritable labyrinthe, on y pénètre par une porte de fête foraine, sortie tout droit de nos rêves les plus improbables. Ce périple au pays des fous commence alors par une rotonde un brin mystique, plongée dans l’obscurité, où défilent sur les murs les portraits des plus grands artistes surréalistes, et les lignes de mire principales du mouvement. En son centre, une table illuminée, sur laquelle sont disposés 17 feuillets du mythique Manifeste du surréalisme rédigé par André Breton, généreusement prêtés par la BnF. Une entrée en matière grandiose, qui pourrait laisser présager de belles choses.
Seulement voilà, derrière, ça ne suit pas. Passée cette première salle un peu innovante, on se retrouve très vite dans un dédale de pièces qui semble ne jamais se terminer. Une approche très scolaire, un peu catalogue, d’un mouvement qui se voulait pourtant aux antipodes du conformisme, du classicisme et du “trop bien rangé”. Des murs unis, le plus souvent blancs, sur lesquels sont disposés des tableaux bien droits, bien organisés par thèmes, et, au centre, différentes sculptures. Une scénographie un peu trop classique, qui nous empêche de plonger à 100% dans les préceptes et la folie caractéristiques du mouvement.

Salvador Dali, Visage du grand masturbateur © Photographic Archives Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía © Salvador Dalí, Fundació Gala - Salvador
Bienvenue dans un royaume de frénésie et de poésie
Bon, si la mise en scène manque un peu d’originalité et de déconstruction, ne nous faites pas pour autant dire ce qu’on n’a pas dit. Certes, c’est un peu téléphoné, ça n’en reste pas moins une belle entrée dans le monde parfois obscure et pas toujours facile d’accès du surréalisme. De manière très complète, l’exposition revient sur tous les grands noms qui ont marqué l’histoire du mouvement, de Breton à Miró, en passant par Ernst, Tanning, Dora Mare, Giacometti, ou encore Apollinaire et Hugo, perçu par les chefs de file comme de véritables précurseurs. Les toiles colorées, les meubles recomposés et les photographies surexposées se succèdent, pour nous inviter à entrer dans le monde du rêve et de l’imaginaire.
L’exposition se présente donc comme le parfait moyen de faire un tour d’horizon (quasi) exhaustif du surréalisme, particulièrement propice à ceux qui n’auraient aucune notion d’histoire de l’art, et voudraient creuser un peu plus cette époque particulière. Grands thèmes, grands noms, grandes techniques, rien n’est oublié pour donner une image aussi complète que possible – peut-être un peu trop, soit – et offrir de bonnes bases. Mention spéciale aux notions d’inconscient et de “hasard objectif”, deux concepts aussi fascinants que mystiques, évoqués notamment grâce à une toile de Giorgio de Chirico représentant Apollinaire blessé à la tempe, deux ans avant qu’il ne soit touché exactement à cet endroit pendant la Première Guerre mondiale…

Victor Brauner, André Brton, Oscar Dominguez, Wifredo Lam, Anonyme, Jacques Hérold, Jacqueline Lamba © Ville de Marseille, Dist. RMN - Grand Palais / Jean Bernard © Adagp, Paris, 2024
En bref, même si l’exposition est parfois un peu longuette, le Centre Pompidou nous livre un beau portrait du surréalisme. Un chouïa entendu, et sans doute trop lisse, c'est donc surtout tout une leçon d’histoire de l’art intéressante, qui malheureusement esquive certains des grands enjeux du mouvement, comme la politique ou les conflits internes. Et, soyons honnêtes, 13 salles, c'est trop. Si vous êtes curieux et disposez d’un peu de temps devant vous, ça reste malgré tout une belle opportunité de visiter Beaubourg, et de dire au revoir pour les 5 prochaines années à ce monument incontournable du paysage parisien.
Surréalisme. Le surréalisme d’abord et toujours
Centre Pompidou
Place Georges-Pompidou – 4e
Jusqu’au 13 janvier 2025
Plus d’infos
