Et si on plongeait dans la Seine ?

Les curieux en maillots de bain affluent petit à petit sous la passerelle du bassin de La Villette, à l'ombre d'un soleil de plomb. La chaleur est écrasante. Il est 19h30. Sur le quai, une joyeuse bande de baigneurs gonflent des matelas pneumatiques, coulent des brasses et sautent du pont. Ici, le plan nager à Paris n'a rien d'un vain mot et les nageurs militants défient avec panache l'insalubrité de l'eau. Le Bonbon les a suivi le temps d'un plongeon sauvage. Plouf.

« Il fait trop chaud, on en a rêvé toute la journée ! » s'exclame tout sourire Gaelle, 22 ans. « Toute la journée, mes collègues ont essayé de me dissuader de le faire en me disant que c'était dégueu » assure-t-elle alors qu'elle s'apprête à plonger dans le grand bain parisien. Comme elles, ils sont une petite centaine à se presser sur les bords du quai ce Mercredi pour revendiquer, le temps d'une baignade, la réappropriation de ce lieu naturel contre l'interdiction préfectorale. Les fraudeurs en slips de bain risquent 15 euros d'amende. Mais la menace s'est bel et bien évaporée sous la vigueur des rayons.

« J'ai quand même une petite appréhension » concède Mathilde, 24 ans encore un peu frileuse avant de tenter l'expérience : « Je me suis renseignée vite fait avant de venir. J'ai lu que c'était la meilleure zone pour se baigner. » Gaelle, reprend : « Se jeter à l'eau ici, c'est un peu défier les personnes qui pensent que c'est impossible à Paris. Il faut se dire que ce n'est pas beaucoup plus pollué que la mer finalement ». Autour, ça plonge tranquille, les pieds d'abord, jusqu'à ce que Martin et son acolyte se jettent enfin à l'eau sous l'oeil approbateur et impatient de la foule, prête à suivre.

« L'eau est super bonne » Du côté des instigateurs de ces baignades sauvages qui ploufent dans les eaux de leur quartier depuis maintenant deux ans, l'objectif est clair : pousser Paris à rejoindre le mouvement des autres capitales européennes qui disposent déjà de ce type d'aménagements, comme Amsterdam. « C'est pas si compliqué que ça » défend Martin : « On se retrouve, on boit une bière et on y va. Le plan nager à Paris prévoit un nouveau bassin flottant, mais ça ne sera qu'une piscine supplémentaire alors qu'on a tout ce qu'il faut. Il suffirait de nettoyer un peu, de mettre une échelle et quelques douches pour qu'on puisse en profiter pleinement et librement ». « Je me suis déjà baignée à Hambourg dans les estuaires. Il y a des petites plages aménagées avec des transats... C'est parfaitement autorisé et encadré. L'eau n'est pas plus trouble ici, il y a simplement quelques algues » précise Elise encore dégoulinante à sa sortie.

Si l'ambiance n'est pas tellement à la politique, la petite sauterie mouillée organisée par le Laboratoire des baignades urbaines expérimentales n'en reste pas moins un signe de résistance à l'heure où le plan Nager pour Paris a fait une croix sur les plongeons dans la Seine. Le laboratoire n'est cependant pas une asso, et n'offre qu'un petit combat crawlé, spontané et libre. Sans être tout à fait responsable : « On n'engage aucunement notre responsabilité et nous n'avons pas de vocation politique à proprement parler. Nous voulons juste kiffer et si on peut donner des idées, tant mieux » nous dit-on.

Kevin lui, habite tout près et se réjouit de l'initiative : « Ca donne carrément envie de recommencer. Mais tout seul, c'est quand même moins évident, je ne sais pas si j'oserais. Et puis les flics nous vireraient plus vite ! ». Derrière, un petit saut de l'ange et quelques saltos éclaboussent les curieux. Paris est prête pour les JO et a peut être trouvé son bassin Olympique. Plouf.

Pour vous rafraîchir, en plus de son guide pour survivre et de ses astuces, le Bonbon vous offre cette petite vidéo :