[ITW] On a rencontré Nora l'exploratrice

undefined 15 mars 2019 undefined 15h14

Rachel Thomas

Voir Nora Hamzawi sur scène, c’est un peu comme passer la soirée avec sa bonne 
pote rigolote, celle avec qui tu bois 
une bouteille de rouge quand ça ne va pas, celle qui a toujours été là, celle qui te donne l’impression d’être moins barge et qui te fait 
rire aux éclats. Mais la stand-uppeuse, actrice et chroniqueuse, a pris de la bouteille et du naturel depuis la dernière fois. C’est devant deux œufs à la coque qu’on a refait le monde, Nora et moi.

Au départ, tu souhaitais être comédienne ou humoriste ?

Je voulais être comédienne mais je passais des castings un peu foireux et puis je n’aimais pas ce côté “attente”. En parallèle, je faisais 
des études parce que je voulais être indépendante et pouvoir payer mon loyer. 
Le déclic de l’humour s’est passé lorsque 
je faisais un stage dans un cabinet d’études, c’était hyper chiant, j’étais assez déprimée. Ma meilleure amie m’a secouée, elle m’a dit : 
« t’as envie de jouer, tu écris, fais-toi jouer, monte sur scène, fais ton propre spectacle », et c’est comme ça que ça a commencé. Le soir je jouais, et la journée j’étais au boulot.

Et puis il y a eu ton passage dans On n’demande qu’à en rire (Jean Benguigui, l’un des jurés de l’émission, l’humilie en public, ndlr).

Oui, un réel électrochoc. Ça a été très violent mais c’est à ce moment-là que je me suis dit qu’il fallait absolument que je quitte mon boulot et que je ne fasse que ça, que je sois déterminée à ne faire que ça, et que je ne laisse personne influencer mes choix de vie. C’est là que j’ai lancé plus sérieusement mon premier spectacle (le premier à avoir été produit), que j’ai cherché un producteur, 
que j’ai fait de la radio et de la télé.

J’imagine que ça a été un joli déclencheur pour ton rêve de cinéma ?

Oui et non. à l’époque j’ai reçu quelques propositions mais elles ne m’ont pas autant intéressée que ce que j’aurais cru. Finalement le one-man qui, au départ, était un chemin pour arriver à ce que je voulais, est devenu ce que je préférais faire. En tous cas, jusqu’au film d’Olivier Assayas.

Pourquoi as-tu accepté de jouer 
le rôle de Valérie dans Doubles vies d’Olivier Assayas ? Qu’est-ce que le film avait de plus que les autres ?

J’ai toujours aimé les films qui parlent du couple (Maris et femmes en favori), j’espérais voir un film sur le couple inscrit dans notre époque. Voir à quel point certaines choses ont changé dans nos manières de communiquer et à quel point l’essentiel reste aussi. Valérie porte son couple, elle est extra-lucide. J’ai adoré jouer ce rôle de femme trompée mais qui n’est absolument pas une victime, ça change de ce qu’on a l’habitude de voir au cinéma. Et puis, avec un partenaire comme Vincent Macaigne, c’était vraiment super.

Que trouves-tu dans le cinéma que tu ne trouves pas sur scène ?

Le fait de faire confiance à quelqu’un, de me laisser porter.

Et à l’inverse ?

L’instantanéité et le rapport au public. Sur scène, on a tout, tout de suite et en direct. J’adore tourner mais je ne me vois pas arrêter le one-man. C’est essentiel pour moi. Pour la liberté que ça me procure.

Scène, ciné, radio, télé… quelle vie bien remplie ! Es-tu toujours l’éternelle insatisfaite que tu décrivais dans ton livre 30 ans (10 ans de thérapie) ?

Ce qui m’amuse, c’est d’inventer des histoires. Je me suis posé la question du personnage que j’allais créer et interpréter sur scène et des difficultés auxquelles il allait devoir faire face. J’ai trouvé cette éternelle insatisfaite et je l’aime beaucoup. Mon spectacle, par exemple, est hyper personnel mais je ne raconte jamais ma vie. Moi personnellement ça va, je suis hyper heureuse de vivre de ce que j’aime et je trouve que c’est une chance immense mais si je dis ça, ça n’a aucun potentiel comique, d’où la différence entre moi et le personnage que j’étire sur scène.

Quel a été le processus de création de ton nouveau spectacle ?

Quand j’ai décidé de monter à nouveau sur scène, j’avais déjà quelques sujets en tête parce qu’après avoir joué le même spectacle 5 ans, il y avait des nouveaux thèmes que je voulais aborder, mais qui ne collaient pas au spectacle que je jouais. Quand ça s’est terminé, j’ai commencé l’écriture, j’ai passé pas mal de temps à avoir l’impression de ne rien faire. Je ne faisais que réfléchir, écrire des choses un peu nulles ou trop théoriques, réfléchir encore et réécrire. Trois semaines faites d’insomnies et de nervosité… Ensuite il y a le passage du texte écrit au texte debout, ce que j’appelle la version parlée, le passage à l’oral. C’est là qu’on se rend compte de ce qui est trop intellectualisé ou trop écrit. Ensuite je me lance à jouer d’abord dans une petite salle, une dizaine de dates à la Comédie des 3 Bornes devant 40 personnes, puis au République une quinzaine de dates devant 200, et puis je décide de quitter le rodage et on démarre vraiment. De toute façon ça s’ajuste en permanence.

En quoi tu te sens plus vieille qu’il y a 5 ans ?

Quand je rencontre des personnes nées dans les années 90 ou 2000. J’ai vraiment un bug. Comme une sorte de faille spatio-temporelle où je ne comprends pas le temps qui est passé. Il y a aussi cette espèce d’indulgence que j’ai de plus en plus, j’en parle dans le spectacle quand je dis : « Avant, quand je voyais une pouffe, je me disais que c’était une pouffe, maintenant je me dis juste qu’elle est jeune et qu’elle s’amuse ».

J’ai lu que tu adorais te faire pleurer sur de la musique triste…

Oui une fois de plus c’est mon personnage, j’ai des côtés comme ça mais de moins en moins. Et puis le personnage, comme moi, est devenu mère, ses névroses se sont déplacées, c’est ce que j’explique dans le spectacle quand je dis que j’ai moins le temps de m’engueuler et que je me rends compte qu’avant c’était vraiment un hobby.

Qu’est-ce que tu préfères faire le plus à Paris ?

Être chez moi. C’est terrible hein, mais j’aime beaucoup être chez moi, me demander ce que je vais me cuisiner, me faire des courses de bouffe, m’acheter de bons produits.

Quels sont tes hotspots parisiens ?

Je suis obsédée par la déco donc j’adore la boutique Simrane et Le Monde Sauvage.

Quels sont tes futurs projets ?

On vient de finir le tournage du film de mon frère Amro Hamzawi qui sortira à la rentrée. 
Il y a également un film de Nicolas Pariser que j’ai tourné avec Anaïs Demoustier, qui sortira à l’automne.

Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour 2019 ?

D’être heureuse.


Nora Hamzawi au République

1 boulevard Saint-Martin - 3e
jusqu’au 27 avril 2019