L\'interview exclusive et sans langue de bois du sapin de l\'Elysée

undefined 12 décembre 2017 undefined 12h45

Camille H

Le palais de l'Elysée se doit d'envoyer du bois, surtout lorsqu'il s'agit de la décoration de sa cour d'honneur. Noël oblige, il faut un sapin d'exception, qui puisse rayonner avec panache. Que chaque visiteur se dise : « les Français, ils rigolent pas avec Santa ! » Et si on en apprenait un peu plus sur le sapin de Noël de l'Elysée ? Son nom, ses mensurations, ses origines : on va passer au peigne fin ses aiguilles de conifère en fête. 


Salut à tous les humanoïdes. Je m'appelle Nordmann, j'ai 25 ans et je suis un sapin de compétition. Je mesure 13 mètres, donc pour moi vous êtes des petites fourmis rigolotes. Je fais 5 mètres de large et ma balance affiche 2 tonnes au compteur, donc autant vous dire que je pèse dans le game des conifères. Je trône fièrement dans la cour d'honneur de l'Elysée. Je suis né en 1992 dans une pépinière du Morvan, j'ai été élevé respectueusement, en protégeant l'environnement dans une démarche qu'on appelle “Fleurs de France”. J'ai grandi au vert tu vois. J'ai respiré l'air non saturé des hautes collines de Franche-Comté. J'ai pas vraiment de papa ou de maman mais en fait VAL’HOR, l’Interprofession française de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage, et l’Association Française du Sapin de Noël Naturel (AFSNN) s'occupent de moi. Un jour quelqu'un m'a repéré, comme les acteurs qui se font caster dans la rue, tu vois, comme ça, au feeling. C'est le jardinier en chef de l’Elysée qui a détecté mon potentiel, il a tout de suite vu que j'en avais dans la sève, que j'avais le tronc solide et les aiguilles bien affûtées. Je suis vaillant moi tu sais. J'ai même pas eu peur quand le bûcheron s'est ramené le 21 novembre dernier pour me couper la tige. Ensuite j'ai fait un long voyage, j'ai été acheminé de Joigny dans le 89 jusqu'à Paris, grâce au concours de Voies navigables de France, puis du quai des Champs-Elysées jusqu'au palais de l'Elysée à l'aide de chevaux. T'aurais vu ça, je chantais à tue-tête Mon beau sapin, c'était un beau voyage. Puis on m'a installé et j'ai été décoré par douze professionnels du végétal, eh ouais. 

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Ils ont choisi un ton bleu, peut-être pour faire plaisir à Michou, je ne sais pas. Bien sûr, tout ça a été fait avec une bonne dose d'éco-responsabilité. Mes guirlandes sont équipées de lumières basse consommation. J'aime pas trop en parler, mais après les fêtes, j'irai sur une plateforme de compostage des déchets verts pour être réutilisé en amendement des sols, en agriculture ou en paysage. Mais pour l'instant je vis dans le présent, je savoure l'instant, tu vois. Je me marre bien à regarder le bal des ministres dans la cour. Ils ont toujours l'air pressé avec leurs petites sacoches et leurs cravates étriquées. J'ai l'impression que ça leur fait plaisir de me voir quand même. Et puis peut-être que ça leur donnera des idées. Que eux aussi, ils prendront un sapin naturel. Ça permet quand même de limiter les gaz à effet de serre, de réduire les déchets et d'améliorer la stabilité des sols. C'est ce qu'on appelle un choix écologique et utile pour l'économie locale. L'année dernière, y'a quand même 6,1 millions de Français qui ont adopté un sapin comme moi, naturel. Parce que moi, quand je pense à l'état dans lequel on a mis la planète, bah ça me fout les boules. Quand je vois les ours polaires qui meurent à petit feu, je me dis que quand même, ça sent le sapin ! Mais bon, je veux pas appuyer avec mes aiguilles là où ça fait mal. Mais je veux pas faire de langue de bois non plus. Bref, joyeux Noël à tous, du haut des sommets de l'Elysée, je vous regarde et je vous embrasse, veilles branches.