Guide des maisons closes du XIXe siècle

undefined 20 octobre 2015 undefined 00h00

La Rédac'

Je vous parle d'une époque où Le Bonbon n'existait évidemment pas mais où des guides touristiques savamment documentés recensaient les meilleures maisons closes parisiennes. J'ai nommé parmi-eux "Le guide rose des étrangers dans Paris" écrit en 1869 par un certain L. Desrousseaux, étonnamment bien renseigné. Merci au blog Il était Paris

 

Tout d'abord une rapide mise en contexte s'impose. Le XIXe siècle est l'âge d'or de la prostitution à Paris, une période qui lui a valu le charmant surnom de "bordel de l'Europe" où l'on dénombrera jusqu'à 200 maisons closes officielles. Elles ont été légalisées par Napoléon Ier en 1804, leur tolérance étant toutefois tributaire d'une certaine discrétion : il ne fallait pas que l'on puisse voir ce qu'il se passait à l'intérieur, d'où le nom de "maison close". Volets fermés, une plaque de numéro de rue plus grande que les autres, rideaux occultants, lanterne rouge et barreaux aux fenêtres. Ces signes sont autant d'indices qui vous permettent encore aujourd'hui de déceler d'anciennes maisons closes, qui ont toutes fermé en 1946. Vous êtes désormais prêts pour un petit florilège des "meilleurs" lieux de débauche de l'époque, toujours selon ce Monsieur Desrousseaux.

 

La plus huppée : Le Chabanais.

Elle était située au 12, rue Chabanais, dans le 2arrondissement, et il n'en reste aujourd'hui que deux ascenseurs qui servaient à éviter d'embarrassantes rencontres. Fondé par une Irlandaise en 1878, cet endroit était jusqu'à sa vente aux enchères en 1951 le lieu de prédilection de tous les ministres et ambassadeurs de l'époque. Ses chambres étaient plus extravagantes (voire glauques) les unes que les autres : japonaise, Louis XV, hindoue, Directoire, Napoléon III et médiévale ou encore mauresque. Parmi elles, il y en avait même une réservée au prince de Galles ; parmi le mobilier de celle-ci, un "siège de volupté" lui permettait de profiter des services de la maison sans pour autant remettre son rang en cause, car il s'asseyait dessus.

La plus extravagante : le One Two Two.

Son nom était tiré de l'adresse : 122, rue de Provence dans le 8e arrondissement, la façade d'époque est encore visible. La maison offrait à ses clients de pratiquer le "voyage autour du monde" qui consistait à exécuter des figures inspirées du Kamasutra dans 22 chambres avec des décors insolites, mais pas forcément avec bon goût. Parmi elles, la chambre de torture du Moyen Âge (avec carcans, chaînes et fouets), le grenier à foin, la chambre igloo, la chambre provençale, la galerie des glaces comme à Versailles (avec des miroirs pivotants) et enfin une qui fait encore plus froid dans le dos : la chambre des supplices avec mise en scène de crucifixion.

 

La plus dépaysante : le Sphynx.

Elle avait élu domicile au 31, boulevard Edgard-Quinet dans le 14e arrondissement de Paris. A travers sont décor néo-égyptien, son ambition était de représenter l'Egypte à Paris, et sa propriétaire Marthe Le Mestre se faisait même appeler "Marmoute". Le tarif unique y était de 30 francs, complété par des pourboires et cadeaux de la part de la clientèle. Pour autant, cette maison close ne plaisantait pas avec l'hygiène et elle était étroitement surveillée par la brigade mondaine au moyen de fiches de police, écoutes et photographies. Cela s'explique par une clientèle très chic et mondaine qui comptait entre autres Jacques Prévert, Colette, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir...

Bibliographie :

CHARBONNEAU Nicolas et GUIMIER Laurent, Le Roman des maisons closes, Editions du Rocher.

DESROUSSEAUX, Le guide rose des étrangers dans Paris, 1969

TEYSSIER Paul, Les Maisons closes parisiennes. Architectures immorales des années 1930, Editions Parigramme.

PIERRAT Emmanuel, Almanach des demoiselles de Paris. Suivi du Dictionnaire des nymphes du Palais-Royal, Broché, 1999

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