L'Australie autorise l'usage thérapeutique de l’ecstasy et des champignons hallucinogènes

undefined 3 juillet 2023 undefined 18h23

Nicolas Cogoni

Oui vous avez bien lu. À partir d’aujourd’hui, les psychiatres agréés peuvent désormais prescrire de la MDMA et de la psilocybine (principe actif du champignon hallucinogène) aux personnes souffrant de stress post-traumatique et de certains types de dépression. Prise en février par l'organisme australien de surveillance des drogues, cette décision est jugée prématurée par certains scientifiques. Des essais cliniques sont également en cours dans certains États américains et au Canada.


Une prise thérapeutique encadrée

Selon Mike Musker, chercheur en santé mentale et en prévention du suicide à l'Université d’Australie-Méridionale, la MDMA donne aux patients « un sentiment de connexion » qui leur permet de faciliter le contact avec le thérapeute et d’échanger sur leurs expériences traumatiques. Quant à la psilocybine, elle pourrait aider à lutter contre la dépression : l'« effet psycho-spirituel » de cet hallucinogène, « que l'on n'obtient pas avec les médicaments traditionnels […] peut changer votre perception de vous-même et de votre vie [...] et avec un peu de chance, cela peut vous donner envie de vivre ». 

Cette utilisation des psychédéliques sera surveillée de près. Cependant, le chercheur pense que ces drogues ne devraient pas être « largement utilisées » par les patients avant 2024, le processus thérapeutique étant assez lourd et coûteux (environ 609€ la séance). Pour la MDMA, le patient aurait par exemple trois traitements sur une période de cinq à huit semaines, chaque séance durant environ 8h. Et pour éviter tout bad trip susceptible de faire revivre les traumas du patient, le thérapeute resterait avec lui tout au long de sa prise de drogue.


Une décision jugée précipitée par certains experts

Pour Susan Rossell, neuropsychologue cognitive à l'Université Swinburne de Melbourne, le traitement a été adopté beaucoup trop rapidement par le gouvernent australien, même si les psychédéliques ont très certainement un « potentiel » thérapeutique. « Pour tout autre type de maladie, qu'il s'agisse d'une maladie cardiovasculaire ou d'un cancer, il est impossible de mettre un médicament sur le marché aussi rapidement qu'on l'a fait dans le cas présent », a-t-elle déclaré à l'AFP. « Il n'y a pas de médicaments sur le marché qui n'aient pas fait l'objet d'essais cliniques de phase 3 et de phase 4 — et c'est ce que nous faisons ici. ».

Pour le ministère australien de la Santé, cette décision « tient compte du fait que les preuves concernant l'utilisation de ces substances dans le traitement des maladies mentales ne sont pas encore bien établies ». « Toutefois, les avantages pour certains patients [...] l'emportent sur les risques. » « Il y a actuellement un manque d'options pour les patients souffrant de maladies mentales spécifiques résistantes aux traitements. »