Désobéissance, la perruque de la discorde

undefined 26 juin 2018 undefined 09h56

Louis Haeffner

Incroyable comme une perruque peut changer un visage. Dans Désobéissance, Rachel McAdams ressemble à une ménagère de 40 piges en dépression, sauf qu'elle en a dix de moins et que... attendez quoi ? elle a la quarantaine ? Bon, ben en tout cas elle a l'air déprimée, et... oui, ok, elle est déprimée. Bon, c'est quoi ce film alors ?


Un film sur la dépression, c'est ça ? Calmez-vous enfin ! en plus non, ce n'est pas exactement ça, mais plutôt un film sur l'oppression naturelle de son milieu social. Ronit est photographe à New York. Le jour où elle apprend que son père, avec qui elle n'est plus en contact depuis bien longtemps, est décédé, elle décide de retourner dans la communauté juive-orthodoxe qu'elle a pourtant fui pour lui rendre un dernier hommage, à lui, le Rav. Mais son retour ne va pas faire que des heureux, loin s'en faut, et va même faire remonter à la surface des émotions profondément enfouies lors de son départ.

Désobéissance film critique

Sans vous dévoiler toute l'histoire du film, l'élément déclencheur de son intrigue est bien évidemment le milieu social dans lequel Ronit a grandi, et les règles strictes que sa communauté impose, d'autant plus quand on est la fille du Rav. Le cadavre gorgé d'eau qui remonte à la surface, c'est donc son histoire d'amour adolescent avec Esti, aujourd'hui mariée à leur meilleur ami et successeur du Rav, Dovid. Oui, c'est un beau bordel, et Ronit aurait peut-être mieux fait de rester à New York exercer sa sensibilité là où elle est bénéfique, du moins c'est ce qu'un certain nombre de membres de sa famille et de sa communauté lui font comprendre.

Désobéissance film critique

On se trouve donc au milieu d'un tourbillon de reproches, de sentiments refoulés, de désirs contenus, de filiation contrariée. Sebastián Lelio pose là sa caméra avec une discrétion très à propos, nous permettant de voir sur les visages et sur les corps de ses deux actrices principales les effets de telles restrictions. C'est bouleversant et d'une délicatesse infinie dans la mise en scène, mais presque brutal dans l'expression du désir : nos deux Rachel (Weisz et McAdams, toutes deux parfaites) respirent fort, s'embrassent fort, et rien d'autre ne compte l'espace d'un instant. Elles seront malheureusement vite rattrapées par la réalité de leur situation, et le dramatisme des choix qu'elles vont avoir à faire n'aura d'égal que la puissance de leur amour. 

Désobéissance film critique


Ce que Lelio nous dit, en substance, c'est que si on ne choisit pas l'environnement dans lequel on naît, il nous est cependant possible, avec du courage, de choisir la vie que l'on veut mener. Le libre-arbitre doit être notre seul guide, car c'est cette même qualité qui fait de nous des hommes.
 Vous porteriez une perruque à 40 piges, vous ?