Après Wrong Cops en 2014 et Réalité en 2015, le talentueux et quelque peu farfelu Quentin Dupieux nous revient avec une comédie déjantée mettant en scène des policiers. Un thème qui deviendrait presque récurrent chez ce drôle d'Oizo, toujours là où on ne l'attend pas.
Dans une salle aux tristes murs de béton et dont le mobilier fait penser à une mauvaise série policière des années 80, Buron et Fugain se font face, de part et d'autre d'un bureau en formica. Fugain, c'est l'interrogé, et Buron, l'interrogateur. Un homme est mort, plus tôt dans la soirée, au pied de l'immeuble de Fugain. L'ayant découvert et après avoir prévenu la police, il est le principal (et seul) suspect. C'est cette nuit passée au poste et les différents personnages qui l'habitent que le film nous raconte.
C'est donc à priori une sorte de huis clos que nous propose cette fois Quentin Dupieux, et de nuit en plus, lui qui était jusqu'ici plutôt habitué aux ciels bleus de la Californie. Le problème c'est que souvent, dans les huis clos, on s'ennuie un peu, d'autant plus s'il s'agit d'un simple interrogatoire. Alors pour rendre tout ça intéressant et, tant qu'à faire, drôle, le réalisateur nous joue des tours, nous fait en quelque sorte de l'esbrouffe, et c'est absolument brillant.
Le plus important dans ce style de film, ce sont les dialogues. Savoureux et désopilants pour la caricature qu'ils font des personnages qui les échangent – un flic et un type innocent qui n'a rien demandé à personne –, ils sont aussi ce qui donne son rythme au film, avec des expressions régulièrement répétées qui fonctionnent comme un refrain donné à la musique du film, par ailleurs très discrète. Ajoutez à cela quelques superbes idées de mise en scène, une temporalité à géométrie variable qui contribue à perdre intelligemment le spectateur, un Benoît Poelvoorde qui excelle dans un registre qui lui colle parfaitement à la peau et un twist final déroutant, et vous obtenez un cocktail délicieux d'humour, de finesse et d'originalité.
Grâce à des comédiens ayant totalement compris et adopté son style si particulier, Quentin Dupieux donne à son premier film français cette saveur rare et inestimable qu'ont les films inclassables, destinés à devenir les trésors qu'on ressort fièrement des années après. Au Poste !, c'est un tour de passe-passe, une farce aussi loufoque qu'intelligente.