Coupe du monde : une entreprise chinoise ayant construit un camp de concentration ouïghour embauchée par le Qatar

undefined 27 octobre 2022 undefined 16h30

Auriane Camus

La Coupe du monde au Qatar ne cessera visiblement pas de faire parler d’elle. À moins de deux mois du lancement de l’événement sportif qui est sur toutes les lèvres, le journal anglais The Times vient de faire une nouvelle révélation : China Railway Construction Corporation, l'entreprise chinoise qui a construit le stade où se jouera la finale de la Coupe du monde au Qatar, est également celle qui a construit un camp de concentration pour Ouïghours, à Onsu.


Un chantier qui ne cesse de faire débat

Vous avez certainement déjà vu passer des images de l’énorme coupole futuriste et dorée du stade Lusail, qui sera le théâtre de la finale de la Coupe du monde au Qatar. Parmi les 8 enceintes sportives qui accueilleront les joueurs du monde entier, celle-ci est la plus grande avec ses 80 000 places assises. Estimé à près de 7 milliards de dollars, le chantier des huit stades situés autour de Doha est au cœur d’un scandale écologique et humain depuis plusieurs mois, notamment en raison du gigantesque système de climatisation installé dans chaque stade, mais aussi à cause des plus de 6500 ouvriers étrangers morts pendant les travaux.

Véritable désastre environnemental et humanitaire, l’événement sportif de l’année vient désormais ajouter une nouvelle ligne au cahier de doléances qui lui est publiquement adressé en s’alliant avec un pays autoritaire au détriment des droits humains, et ce sans aucune réaction de la part de la FIFA. La construction du stade Lusail, qui a débuté en avril 2017, a été confiée à la China Railway Construction Corporation, une des plus grandes entreprises du BTP chinois, mais qui est surtout celle ayant bâti un centre de détention de haute sécurité à Onsu, dans le sud du Xinjiang, où la population ouïghoure est persécutée depuis le début des années 2010.

Pour faire simple, l’entreprise embauchée par les Qatari a directement participé aux crimes contre l’humanité commis contre le peuple ouïghour, en s’associant avec l’organisation para-militaire responsable du génocide en cours. Cette dernière avait été sanctionnée par l’Union européenne pour son rôle clé dans la déportation, l’internement et la réduction en esclavage du peuple ouïghour. Une nouvelle qui fait froid dans le dos, quand on sait que des milliers de supporters occuperont bientôt le stade.


Un argument de plus pour boycotter la Coupe du monde

Si la coupe du monde au Qatar nous avait déjà donné de nombreuses raisons de la boycotter, voici une nouvel argument pour ne pas regarder les matchs qui seront diffusés à partir du 20 novembre prochain. Mais à notre échelle, le boycott n’aura malheureusement pas un grand impact puisque l'événement aura tout de même lieu, à plusieurs milliers de kilomètres de là.

C’est la raison pour laquelle l’eurodéputé Raphaël Glucksmann a souhaité interpeller le président Emmanuel Macron, le priant de ne pas se rendre au Qatar à l’occasion de la Coupe du monde. Sur Instagram, le président de la commission spéciale sur l’ingérence étrangère dans l’ensemble des processus démocratiques de l’Union européenne écrit : « Il est impensable que notre président ou nos ministres viennent cautionner cette gigantesque opération de communication du Qatar. Aucun représentant officiel de notre démocratie ne doit se rendre à Doha. M. Macron : vous ne pouvez pas faire comme si tout cela n’existait pas ».

En effet, malgré les nombreuses polémiques autour de la compétition internationale, le président français et le gouvernement ont fait le choix de ne pas assumer officiellement un boycott diplomatique de l’événement. En février 2022, Emmanuel Macron avait déjà refusé le boycott des JO d’hiver en Chine, malgré le génocide en cours contre la population ouïghoure.


Une alliance inquiétante entre le Qatar et la Chine

Ces dernières années, le régime qatari s’est rapproché de façon inquiétante de la Chine. Le 6 octobre dernier, il avait déjà voté contre la tenue d’un débat sur la situation au Xinjiang, auprès du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Outre la Chine et le Qatar, d’autres pays avaient voté contre la tenue du débat, notamment la Bolivie, Cuba, l’Indonésie, le Pakistan, le Venezuela ou les Émirats arabes unis.

Le 20 octobre, le Qatar accueillait également deux pandas « offerts par les 1,4 milliard de Chinois », comme l'affirmait l'ambassadeur de Chine dans l'Émirat. Si cette nouvelle peut prêter à sourire, ce geste de la part de Pékin cache en réalité des liens économiques et diplomatiques en pleine expansion, notamment du côté des contrats gaziers.