Depuis 1892, la Droguerie Taverne trône fièrement au 14 rue Saint-Antoine du T comme une grand-mère qui aurait tout vu sans jamais juger. Cette boutique, nichée en plein cœur de Toulouse, a accompagné les saisons, les familles, les guerres et les révolutions ménagères. Une vraie madeleine de Proust pour celles et ceux qui aiment autant les odeurs de savon de Marseille que les histoires de famille.
Une évolution portée par les femmes
Avant d’être une droguerie, Taverne était une entreprise de peinture, fondée par un arrière-grand-père artiste des Beaux-Arts, roi du trompe-l’œil et des pigments en vrac. Mais c’est l’arrière-grand-mère, dégourdie et visionnaire, qui a flairé le potentiel d’une boutique dédiée à l’entretien du quotidien. Pendant que son mari peignait des enseignes, elle tenait le comptoir, développait la clientèle et posait les bases d’un commerce où les femmes trouvaient enfin des produits en petites quantités pour bichonner leur intérieur.

Danseuse, musicien, chanteuse : les Taverne ont le flair artistique dans le sang, mais leur vrai don, c’est le contact humain. Béatrice, l’actuelle gardienne du temple, l’affirme : « Ce qu’ils ne trouvent pas ailleurs, ils viennent le chercher ici. » Et au-delà des produits — cire, essence, savon noir, ustensiles en tout genre —, ce que viennent vraiment chercher les clients, c’est une ambiance, un accueil, un souvenir d’enfance qui sent bon la lavande et les vitrines anciennes.
Un lieu de vie depuis plus de 130 ans
À la Droguerie Taverne, on peut acheter un savon et rester pour le plaisir de papoter. Des chaises sont là pour ça depuis l’arrière-grand-père. Les clients s’assoient, discutent, se remémorent. Certains sont venus enfants avec leur grand-mère et continuent d’y passer en adultes, pour l’odeur, l’accueil et la fameuse pièce secrète remplie de flacons anciens et de pinceaux centenaires. Un petit musée vivant dont le “mur des ancêtres” raconte, en photos, un siècle et demi de fidélité.

En attendant, la boutique poursuit son évolution tout en gardant son âme. La 5e génération est déjà là, en embuscade : Sébastien, le fils, a bossé cinq ans dans la boutique et lancé la page Facebook et le compte Instagram. Béatrice, que ses clients appellent “la Bonne Fée”, n’a qu’une certitude : la Droguerie Taverne continuera à vivre, portée par l’amour des Toulousains. Et si Claude Nougaro, les Chevaliers du Fiel ou Michel Sarran y ont déjà fait un tour, c’est que ce lieu a définitivement quelque chose de magique.
