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Le bon à savoir : qui était le premier maire noir de Paris ?

undefined undefined 28 juin 2016 undefined 00h00

undefined undefined 24 août 2016 undefined 10h25

La Rédac'

Severiano de Heredia est le premier homme noir, d’origine cubaine, à avoir été élu maire de Paris en 1873, sous la IIIe République. Personnage politique éminent tout au long de sa carrière, il a pourtant été effacé des archives et des mémoires à sa mort. L’historien Paul Estrade, professeur émérite à Paris VIII, a entrepris des recherches pour restaurer sa mémoire. Il retrace son histoire dans son livre : Ce mûlatre cubain que Paris fit "maire" et la République, ministre, afin de lui redonner la place qui lui est due dans l’histoire de Paris et de la France.  


Fils de parents libres et cousin du poète José Maria de Heredia, Severiano de Heredia naît en 1836 à Cuba. Il est le filleul d’un riche propriétaire terrien. A sa mort, il hérite de sa fortune et part pour Paris où il intègre le prestigieux établissement Louis le Grand dans un cursus de Lettres. Après ses études, il fait ses débuts en tant que journaliste puis rédacteur en chef d’un journal littéraire. En 1870, il obtient la nationalité française après avoir épousé une bourgeoise veuve.

Sa carrière politique décolle lorsqu’il est élu conseiller municipal du quartier des Ternes en 1873. En 1879, il est élu président du conseil de Paris. Il devient le premier maire noir de Paris de l’Histoire ! Par la suite, il obtient deux fois de suite le siège de député de la Seine. Sa carrière est au sommet, lorsqu’en 1887 il est désigné ministre des Travaux Publics dans le cabinet de Maurice Rouvier. Un parcours unique et exceptionnel pour l’époque !

Heredia impressionne par ses idées modernes. Il défendait vigoureusement la laïcité, notamment dans les écoles qu’il voulait gratuites et obligatoires pour les deux sexes. Il soutenait également le développement de l’enseignement professionnel laïc pour adultes et en particulier pour les jeunes femmes. Engagé à gauche, il attachait une attention particulière aux revendications ouvrières, il était pour l’augmentation des salaires, une baisse du temps de travail et des mesures sanitaires. En tant que ministre, il a soutenu la nomination du premier ouvrier au Conseil d’Administration des Chemins de Fer.

 



Mais il faut replacer Heredia dans son contexte. Au XIXe siècle, la France est en pleine expansion coloniale. L’Empire français est le deuxième plus vaste du monde. La présence d’Heredia à la tête de fonctions aussi importantes dérange. Le racisme auquel il doit faire face se renforce lors des débuts des expositions coloniales. Il est traité de « nègre du ministère » et on parle du « ministère chocolat ». Heredia se retire définitivement de la scène politique après avoir essuyé plusieurs échecs aux élections législatives et se consacre entièrement à l’écriture. Il meurt en 1901.

Cette figure politique fut totalement éradiquée des mémoires et des archives. Son nom ne figure même pas au cimetière des personnalités de Paris alors que c'est lui qui a mis en place les premières bibliothèques municipales de la ville ! Il a aussi été président de l’association Philotechnique, succédant à Victor Hugo et Jules Ferry. Il ne reçut jamais la Légion d’Honneur pour ce qu’il a accompli. Severiano de Heredia est le grand oublié de la République, qu’il défendait pourtant.