Les vidéos désarmantes de Peter Campus au Jeu de Paume

undefined 28 mars 2017 undefined 02h00

Olivia

Ce n’est pas souvent qu’une expo est dédiée à la vidéo comme art. Pour sa nouvelle saison, le Jeu de Paume nous montre le travail déroutant du New Yorkais Peter Campus (né en 1937), un des pionniers de la vidéo, figurant parmi les plus influents de sa génération. « Video ergo sum », première exposition entièrement consacrée à cet artiste en France, présente son parcours à travers ses différentes vidéos, installations et photos. Apprêtez-vous, avec cette expo, à plonger dans un univers où vous serez la pièce principale de l’œuvre.  

 

Peter Campus nous invite à faire des expériences étranges

 

Si le travail de Peter Campus se démarque bien par une chose, c’est par cette subtilité particulière dans le concept de ses installations et dans la technologie qu’il utilise.

 

« Ce qui me plaisait dans la vidéo, c’était que la caméra était indépendante à l’époque. On n’avait pas besoin de regarder par le viseur, on pouvait la poser quelque part et voir ce qui se passait, quelles images elles captait, en installant un moniteur plus loin », explique t’il dans un entretien avec la critique d’art Mathilde Roman publié dans le catalogue de l’exposition.

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De 1971 (année où il débute sa création) à 1976, ses œuvres sont marquées par sa volonté de donner une position centrale au spectateur. L’artiste nous invite à participer à diverses installations, et bouscule ainsi notre perception du corps.

 

Peter Campus joue avec la conscience de notre corps

 

Lors de l’expo, on commence par découvrir Optical Sockets (1972-1973).  On entre alors dans un champ où quatre caméras disposées sur des trépieds au ras du sol au quatre coin d’un carré nous filme. Selon notre position, on se voit sous différents angles en même temps, et l’on découvre des points de vues inédits de notre personne.  

 

Avec Anamnesis (1973) notre image prise par une caméra de surveillance est projetée en direct sur un mur. Cette image est redoublée avec un retard de 3 secondes, et dès que l’on bouge, on voit alors apparaître deux doubles de nous mêmes, une qui restera figée et l’autre qui suivra notre mouvement.

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En nous donnant plusieurs visions de nous mêmes à travers ses différentes expériences, l’artiste joue avec la conscience de notre propre corps.

 

On finit par se retrouver face à l’image du visage d’un homme, filmée en continu en plan fixe. Intitulée Head of a Man with Death on His Mind (1977 – 1978), cette œuvre nous met face au regard immobile, et mélancolique d’un acteur. Il s’agira de la dernière œuvre de cette première période de création.

 

Peter Campus abandonne le corps pour la nature

 

Peter Campus s’expérimente pendant un temps à la photo et ne retourne à la vidéo que dans les années 90. Ce n’est alors plus le corps qui l’intéresse, mais la nature, les paysages marins notamment. Le spectateur a beau avoir quitté le centre de l’œuvre, il en restera tout autant obnubilé.

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Avec l’installation « convergence d’images vers le port » (2016) spécialement réalisée pour le Jeu de Paume, on pénètre dans une salle où 4 images du port de Pornic au sud de la Bretagne sont projetées sur chaque mur. On discerne à peine le mouvement dans ces plans fixes et sans montages, tournée en ultra haute définition. Les séquences durent 40 secondes et donnent différentes vues successives. Plongé dans un environnement marin, on se laisse hypnotisés par ces superbes plans, qualifiés par l’artiste comme étant des « vidéographies », en référence à la photographie.

 

« L’installation vidéo était elle pour vous un art éphémère, comme la performance ? », lui demandera Mathilde Roman. « Une fois la pièce éteinte, c’est fini. Ce n’est pas comme si elle restait présente, telle une sculpture dans un musée. J’ignorais si mes installations pourraient vivre plus que quelques années. », conclura-t-il. Cette exposition prenante nous prouve bien le contraire !

 

Peter campus video ergo sum
Jusqu’au 28 mai
Jeu de Paume
1 place de la concorde – 8e