Ces 5 sites porno pourraient bien être interdits en France

undefined 7 juillet 2023 undefined 15h15

Flora Gendrault

Habitués des sites pornographiques, vous pourriez bien tomber sur une page vierge avec le logo "République française" la prochaine fois que vous vient l’envie de consulter votre site de prédilection. En dépend une décision de justice qui concerne la demande initiée par l'Arcom en 2021 de bloquer cinq géants du porno : Pornhub, xHamster, YouPorn, Xvideos et Xnxx pour ne pas les citer. En cause, l’exposition à outrance des enfants à ce type de contenus. 

La décision, qui devait être rendue ce vendredi 7 juillet, vient d'être reportée en attente de l’examen par le Conseil d’État de recours contre le décret qui impose une vérification de l’âge des visiteurs.


Le refus de mettre en place une vérification d’âge 

Si l’Arcom sévit, c’est qu’elle tente en vain de faire respecter l’obligation légale d’empêcher l’accès aux contenus pornographiques par les mineurs. Pour rappel, le Code pénal interdit d'exposer les mineurs à des photos et vidéos pornographiques, et la loi sur les violences conjugales du 30 juillet 2020 précise que les sociétés concernées ne peuvent s'exonérer de leurs responsabilités en se contentant de demander à un internaute s'il est majeur.

Pourtant, en avril, lors d’une audience de près de 4 heures, les avocats des sociétés éditrices des sites cités précédemment ont présenté des demandes en nullité de la procédure initiée par l’Arcom qui visait, et vise toujours, le blocage complet de l’accès à ces sites. Les sociétés refusent de mettre en place une vérification d'âge car elles jugent la loi insuffisamment claire sur les modalités techniques attendues

Un autre danger des plateformes de streaming pornographique mis en avant par les associations féministes : un contenu sexiste, violent, parfois pédopornographique, pouvant heurter la sensibilité des jeunes et, de manière plus insidieuse, modifier leurs représentations de ce que doit être la sexualité. Osez le féminisme, Les Effronté·es et le Mouvement du Nid ont d’ailleurs déposé plainte en novembre contre la plateforme Pornhub pour « diffusion d'images pédopornographiques et de messages violents à caractère pornographique, accessibles aux mineurs ».


Un projet de loi pour « sécuriser Internet »

En parallèle, mercredi soir, le Sénat a voté à l’unanimité le projet de loi pour « sécuriser » Internet, qui comporte également des mesures visant à limiter l’accès des mineurs aux sites pornographiques. Cette loi met en place un dispositif de contrôle de l’âge, et va renforcer les pouvoirs de l’Arcom, qui a eu bien du mal à mener une procédure judiciaire contre d’aussi puissantes sociétés. Grâce à elle, l’instance va pouvoir ordonner le blocage des sites hors la loi en se passant de la décision d’un juge.

Le vote de cette loi est toutefois indépendant de la procédure de l’Arcom, et n’assure pas que les cinq sites soient bloqués à l'avenir, lorsque le tribunal aura statué. 


Un mineur sur trois exposé à près d’1h de porno chaque mois 

Dévoilée en mai, cette étude de Médiamétrie commandée par l’Arcom a de quoi alerter sur le rapport à la pornographie des mineurs. Elle montre notamment que 2,3 millions de mineurs, soit près de 30%, sont exposés à plus de 50 minutes d'images pornographiques chaque mois en France, alors que les adultes sont à 37%, un pourcentage à peine plus élevé. Une « consultation de masse (...) qui se fait essentiellement sur les smartphones, c'est-à-dire hors du regard parental », soulignait le gendarme de l’audiovisuel. Sur la première marche des sites les plus consultés, Pornhub, dont l’Arcom a demandé le blocage. 

Interrogée par le HuffPost, la chercheuse Ludi Demol Defe juge toutefois cette solution peu efficace, puisque n’empêchant pas les mineurs d’accéder à du contenu par d’autres moyens (demander l’accès à leurs ainés, emprunter une carte bleue… ). Selon Demol Defe, elle ne règle pas non plus « le problème des comportements sexistes ou violents et du harcèlement ». Un moyen plus percutant pour la chercheuse : « Investir dans l’éducation à la vie sexuelle et affective. La loi Aubry prévoit trois séances d’éducation à la vie sexuelle et affective par an du CP à la terminale, mais cette loi est peu voire pas appliquée. Cet argent pourrait aussi être investi dans la formation des personnels éducatifs pour intervenir, et pour déceler les mécanismes de violences sexistes et sexuelles ».