Deux amis découvrent qu’ils voyagent avec un meurtrier en cavale pendant leurs vacances

undefined 3 juillet 2023 undefined 18h25

Auriane Camus

Si vous êtes adepte des tréfonds de Twitter, vous avez sans aucun doute vu passer cette histoire à glacer le sang. En vacances en Catalogne, Myriam, 22 ans, et Yanis, 21 ans, un couple d’amis français, ont passé, sans le savoir, 5 jours avec un l’auteur d’un féminicide, en cavale depuis 17 jours. La jeune femme a raconté leur histoire sur son compte Twitter ce mardi 27 juin, et explique comment ils ont réussi à faire arrêter le meurtrier d’origine belge.


Une rencontre tout à fait ordinaire

Tout commence près de Montblanc, une cité médiévale située en plein cœur de la Catalogne. Après plusieurs semaines en roadtrip dans les grandes villes du pays, Myriam et son ami décident de s’y installer quelques jours pour se reposer. Au cours d’un week-end, à Tarragone, ville balnéaire située à quelques kilomètres de là, alors qu’ils se prélassent à la plage, ils font la connaissance de Victor, un homme belge âgé d’une quarantaine d’années. Il dit vouloir « faire le tour d’Espagne pour travailler la langue » et leur confie avoir « encore assez d’argent pour 100 jours de vacances », selon les informations du Parisien.

Victor explique vouloir se faire tatouer : ça tombe bien Myriam est tatoueuse et a emporté son matériel avec elle, elle accepte. Leur nouveau compagnon suit donc les deux amis dans leur voyage à Montblanc. Seul détail troublant : il insiste pour que ses camarades lui prennent son billet de train, car il n’a que de l’espèce sur lui.

Sympathique mais toutefois collant, l’homme commence à leur proposer tout un tas d’activités à faire ensemble, alors que les deux Français prévoyaient simplement de le tatouer avant de tracer leur route de leur côté. Ayant du mal à dire non à leur interlocuteur, Myriam et Yanis se retrouvent à le rencontrer tous les après-midi pendant 5 jours, au cours d’apéro, de sorties à vélo ou encore de randonnées.


Une histoire préocuppante

C’est au cours d'une de ces dernières que le quadragénaire commence à se livrer sur sa vie : ancien pompier, puis instituteur, photographe, ou encore champion de triathlon, Victor dresse un portrait pour le moins élogieux de sa personne. Selon Myriam, « il se vantait beaucoup ». Il explique également avoir deux enfants, avec lesquels il ne s’entend pas du tout, selon lui parce que « ce sont des enfants rois et qu’il ne faut pas élever d’enfants comme ça », mais sans donner plus de détail. Il avoue également aux deux amis avoir fait… de la prison.

C’est à ce moment-là que Myriam et Yanis commencent à se poser des questions. Lorsque la jeune femme l’interroge sur les raisons de son incarcération, sa seule réponse : « j’ai pris trop de coke et j’ai déconné ». Elle devine que sa réponse ne présage rien de bien : « On se disait qu’il devait y avoir une bonne raison pour que ses enfants le détestent à ce point ».

Autre détail important mentionné par Myriam : « Victor n’a jamais abordé le sujet de la mère de ses enfants ». Un scénario commence alors à se monter dans la tête des deux Français : selon Yanis, leur compagnon aurait probablement frappé sa femme et c’est pour cette raison que ses enfants ne lui parlent plus, et qu’il a fait de la prison. Au quatrième jour, Myriam prend donc ses distances : « tout mon corps m’a crié de partir maintenant tout de suite ».

Au-delà de l’histoire parfois douteuse de l’homme, son comportement au cours des vacances a également mis la puce à l’oreille des deux voyageurs. « On n’avait aucun moyen de le joindre, il n’avait pas internet et n’a jamais donné son numéro de téléphone, ça aussi c’était bizarre. Il nous a parlé de lettres qu’il souhaitait poster en y repensant je me dis mais “putain comment on n'a pas compris plus tôt” ».


Un féminicide et une cavale de 17 jours

Le 5e jour de leur rencontre, Yanis explique à son amie que Victor s'appelle en réalité Adrien : « En racontant une histoire [...], il s’est appelé Adrien ». S’apercevant de la stupéfaction de son interlocuteur, le quadragénaire tente d’expliquer son surnom en disant que c’est « un délire avec une amie ». Sans trop se rendre compte de ce que cela cache, les deux amis commencent à penser que l’homme est peut-être en cavale.

Les choses s'enchaînent ensuite très vite. Pour mettre un terme à leurs doutes, Yanis tape « Adrien recherché belge » sur Google. Là, ils tombent sur une série d’articles à propos d’un certain Adrien Rompen, condamné en 2017 à 20 ans de prison pour avoir battu à mort son épouse, Charlène Grosdent. Aucun doute concernant les photos : il s’agit bien de leur “ami” rencontré quelques jours plus tôt. Incarcéré à la prison de Marche-en-Famenne, en Belgique, Adrien Rompen avait bénéficié d’une permission de sortie de quelques heures, de laquelle il n’était jamais revenu, le 9 juin 2023. Cela faisait donc 17 jours qu’il était en cavale lorsque les deux amis se sont rendus compte de ce qui était en train de se passer;

Sans plus attendre, Myriam et Yanis ont cherché comment le coincer, sans risquer de se mettre en danger : « on était tellement stressé de ce qu’il pouvait nous faire ». Une nouvelle recherche Google les dirige vers le 112, le numéro d’urgence européen. Bien que l’échange, en anglais, fut compliqué, Yanis finit par se faire comprendre et explique qu’ils sont avec quelqu’un qui a tué une femme, et qu’il est en liberté.

La solution est trouvée : l’homme est censé les rejoindre à 14h à leur domicile, la police pourra donc l’arrêter sur place. Près d’une heure après leur appel, des agents espagnols débarquent à Montblanc, au moment où Adrien Rompen, serein, arrive pour son rendez-vous avec les Français. « Il ne s’est pas dit que c’était pour lui, il a marché dans leur direction sans se poser de question », se rappelle Yanis au micro du Parisien. Le belge est finalement interpellé sans trop d’efforts.

Quelques jours plus tard, l’arrestation d’Adrien Rompens fait la une des médias belges. Le parquet chargé de l’affaire précise que le fugitif allait être rapatrié pour qu’il « puisse réintégrer un établissement pénitentiaire belge le plus rapidement possible ». De leur côté, alors qu’ils ont continué à séjourner en Catalogne quelques jours après leur mésaventure, Myriam et Yanis se remettent de leur émotions : « On a eu beaucoup de stress, on ne redescend pas mais on a lu les interviews des parents de la victime, de ses enfants qui se disaient soulagés de le savoir arrêté. On a voulu rassurer sa famille en le dénonçant ». Bien qu’ils n’aient toujours pas été sollicités par la justice, la jeune femme tente de voir le positif. Sur Twitter, elle se félicite : « Appelez-moi Sherlock Holmes ».