Les workampers : portraits de ces salariés globe trotters

undefined 12 juin 2018 undefined 15h29

Benedicte

C’est une nouvelle génération de globe-trotters, qui sillonnent les quatre coins du monde… pour travailler. On les appelle les workampers. Des salariés tout terrain qui fuient les bureaux pour privilégier les routes et grands espaces. Un cadre de travail idéal et qui pourtant demande de vrais sacrifices.


Ils sont jeunes ou moins jeunes, célibataires, en couple ou parents et ont décidé de tout plaquer pour vivre une aventure professionnelle. Adieu les réunions jusqu’à pas d’heures et le confort du foyer. Ces français devenus auto-entrepreneurs parcourent la planète plusieurs fois dans l’année tout en travaillant. Cette nouvelle manière de concevoir le travail porte un nom : workamper. A l’origine, les voyageurs investissaient leur dernière économie dans un camping car. Cette nouvelle maison-bureau sur roues permettait de travailler n’importe où sans contraintes. Un nouveau départ avec certes moins de confort, mais qui permettait de gagner en liberté. Aujourd’hui, si la caravane n’est plus obligatoire, l'essence même reste inchangée.


Depuis 2009, Cédric a parcouru une bonne partie du globe en solitaire, fuyant les bureaux des entreprises. Désormais jeune père de famille, son blog lui permet de trouver une source de revenu pour toute sa tribu. Voyager en famille implique forcément un coup plus important : on ne peut plus se contenter d’une auberge de jeunesse quand on a des enfants en bas âges. On va donc privilégier des hôtels plus confortables, et aménager les visites en fonction du rythme des petits”

Une vie de salarié tout terrain qui n’est pas de tout repos. Souvent tributaire de ses clients, Cédric ne perçoit pas toujours une somme régulière. Une incertitude qui, sans le soutien financier de son épouse, aurait pu devenir pesante. En 2009, pourtant encore célibataire, le jeune homme avait trouvé un certain équilibre entre le voyage et le travail, grâce au programme PVT. “Ce qui est génial, c’est qu’avec ce système on délivre des visas temporaires qui permettent de partir n’importe où dans le monde tout en travaillant. Sur place, on fait des petits boulots comme barman ou serveur. Cela nous apporte suffisamment de cash pour pouvoir ensuite voyager où l’on veut dans le pays. Pour moi, c’est l’école parfaite du voyage. “ confie-t-il, un brin nostalgique.


Etre auteur globe trotter lui a permis de gagner en flexibilité et en autonomie. Un luxe qu’il met au profit de sa famille. “Je peux moduler mon emploi du temps comme je le souhaite, et voir mes enfants grandir. Expérimenter le voyage à travers leurs yeux a quelque chose d’unique, ça n’a pas de prix. Je ne pourrais pas vivre autrement que comme ça désormais. “ explique-t-il.

Une expérience que partage Thibault, photographe indépendant. Salarié dans un cabinet de tendance, puis vendeur dans une grande firme high tech, le jeune homme n’arrivait plus à supporter son quotidien. En 2010, il décide de tout quitter pour partir 8 mois seul en Amérique du sud. Cette première expérience lui a donné le goût de la vie freelance. Passionné de photographie depuis toujours, celui-ci partage ses clichés graphiques sur la toile sous le nom d’Hebdomania. Une galerie virtuelle qui lui a permis de se faire connaître, et désormais de vivre de sa passion depuis bientôt deux ans. “Quand j’ai décidé de me lancer à 100% dans la photo, je jonglais entre un travail à mi temps dans la vente et quelques missions en free-lance. Et puis, grâce à mon compte instagram, j’ai très vite été contacté par des clients.“


Sans domicile fixe depuis juin dernier, Thibault voyage de destinations en destinations, logeant parfois chez des amis Parisiens pour quelques semaines. Un nouveau train de vie qu’il a adopté très vite. “Le voyage fait partie de ma vie et de mon travail, donc c’est difficile de dissocier les deux. Maintenant que je n’ai plus de pied à terre officiel, c’est plus simple pour bouger où je veux. A partir du moment où j’ai mon ordinateur et internet, je peux me sentir à l’aise n’importe où.  Et si je n’ai pas de connexion, je me réfugie dans un café pour choper la wifi.” nous raconte-t-il, espiègle.

Malgré les aléas de la vie d’un travailleur indépendant, Thibault a vu son confort de vie s’améliorer très nettement. “ Avant de lâcher mon appart en juin dernier, je payais mon loyer pour rester une semaine, ou quelques jours. Je me suis rendu compte qu’une vie Parisienne, avec tous les coûts que cela implique, revenait au même qu’un quotidien à voyager.” Le photographe pourrait peut être revenir à une vie salariale plus classique… à la condition d’être son propre patron.


Thibault et Capucine, jeune couple de trentenaire, ont eux aussi tenté l’aventure workamper. Ce duo d’hyperactifs du voyage partagent leur belle énergie depuis plusieurs années sur leur blog. Lui est digitalist strategist pour des agences de tourisme, elle, infirmière libérale à Nice deux semaines par mois. Deux métiers qui permettent d’assouvir leur soif de liberté. Si les premiers temps étaient difficiles, aujourd’hui, les deux voyageurs vivent convenablement de leur passion
“Chaque jour est complètement différent. Parfois on commence très tôt, pour photographier un paysage, et d’autre fois on veille très tard pour finir un papier.Notre semaine de travail dépasse souvent les 50 heures par semaine…  Il ne faut pas compter ses heures quand on se lance dans ce projet. “
Parfois, les deux amoureux se retrouvent dans des lieux très reculés, où la connexion internet est très faible. Dans ce cas, le couple usent de trucs et astuces pour répondre à leurs clients dans les temps : “Si on est en Europe, on fait tourner un routeur wifi pour capter internet gratuitement. Pour l’étranger, on privilégie l’achat d’une sim locale (3G ou 4G) pour capter uniquement internet.”


Aujourd’hui, le couple est surtout financé par les offices de tourisme pour lesquelles il écrit. A eux deux, ils touchent également des commissions sur les ventes des équipements qu’ils testent. Des résultats rendus possibles grâce à un investissement conséquent dans du bon matériel. “Avec 5000 euros de budget, on peut vraiment bien s’équiper. Si on veut créer son blog comme nous, je conseil un hybride, pour les photos. C’est bien moins lourd qu’un reflex tout en ayant une qualité équivalente. Si l’on souhaite prendre des photos avec son portable sans trembler, l’accessoire indispensable reste le stabilisateur. Pour ceux qui ont un plus gros budget, le drône est parfait pour faire de belles vidéos. Enfin, je dirais que le plus important est de rester soi-même. Il ne faut pas tout accepter sous prétexte que cela peut nous rapporter de l’argent à la fin du mois. Le but quand on se lance dans ce projet de vie, c’est de rester vraiment en accord avec ses valeurs."