Journal d'un confiné : day 5

undefined 20 mars 2020 undefined 20h05

Lucas Javelle

Ce matin, comme chaque jour depuis lundi, je me suis levé avec une certitude : à partir d’aujourd’hui, je m’y colle. Ce confinement, plus qu’une plaie, devrait être une aubaine pour mener à bien tous les projets que je me suis mis en tête. Ce soir, comme chaque soir, je n’ai aucune case à cocher sur ma to do list parce que je n’ai pas réussi à trouver la motivation nécessaire.

La vérité, c’est que plus le temps passe et plus elle me quitte. Coincé dans une bulle de confort, ce dernier m’oppresse et me rend amorphe. J’ai réinventé l’art de s’asseoir sur un canapé, si tant est que le terme soit encore pertinent. Dans ma plus belle imitation du paresseux, j’occupe mon temps avec mon travail, je dors aussi peu qu’à mon habitude et je gaspille bêtement ces précieuses heures que la vie m’a offertes dans des activités futiles et insipides.

Hier encore, je me risquai à penser que demain serait un autre jour, mais les croix grattées au couteau commencent à repeindre les murs et nous n’en sommes qu’au quatrième jour d’une saison au dénouement incertain. Moi qui suis pourtant de nature casanière, j’avoue avoir légèrement perdu patience plus d’une fois. Pourtant gâté d’une permission de sortie plutôt flexible – et incompréhensible , je n’en ai à ce jour toujours pas profité.

Me voilà alors abandonné à moi-même dans cet espace restreint, sans aucune notion du monde qui m’entoure si ce n’est les éternels cris résonnants de ma gardienne un peu trop excédée par les déboires de son mari. Mon seul contact humain de ces derniers instants aura été celui d’un livreur, ou plutôt sa jambe, au coin du couloir de mon étage alors qu’il partait déjà, fuyant la dure réalité que j’aurais pu, moi aussi, être l’un des malades, en abandonnant ma pitance au pied de ma porte.

J’aurais pu me satisfaire de tout cela, mais je ne pourrais malheureusement que m’en contenter. Dans cette dépression forcée que je n’avais autrefois que trop vécue, je garde tant bien que mal le sourire, même si la douleur ressentie plus tôt la journée m’aura rappelé qu’il n’y a pas de meilleur sentiment que celui de s’être bien fait baiser : j’ai plus de PQ et mon Franprix non plus.