Et si on rendait la ville aux femmes ?

undefined 1 juin 2017 undefined 20h15

Olivia

Une pétition lancée par deux assos du quartier La Chapelle alertant sur la disparition des femmes de l’espace public, une tribune de la philosophe Elisabeth Badinter dans le Point soutenant que les « femmes disparaissent de l’espace public »… L’inégalité hommes/femmes dans nos villes semble être une réalité. C’est d’ailleurs en partant de ce postulat que l’association Womenability est allée sillonner plus d’une dizaine de villes dans le monde afin de s’inspirer de ce qui se faisait de bien ailleurs et trouver des solutions pour rééquilibrer les choses. Charline Ouarraki, co-fondatrice avec Audrey Noeltner et Julien Fernandez de Womenability, nous en a dit un peu plus sur le projet.


De mars à octobre 2016, l’équipe est allée dans 13 villes, mais fait assez notable, elles étaient toutes gouvernées par des femmes maires, choix délibéré de l'équipe pour voir si « cela faisait la différence », explique Charline.

Dans chaque ville, l'équipe a organisé des « marches exploratoires » avec des habitantes en leur demandant de montrer leur ressenti à partir de leurs cinq sens en répertoriant toutes les discriminations qu'elles observaient. Elles ont également répondu à un questionnaire afin d’identifier toutes les formes d’agression urbaine dont elles pouvaient être victimes, et ont surtout raconté ce qu’elles aimaient ou non dans leur ville. L'équipe a également insisté pour que les marches exploratoires soient mixtes « afin que les hommes aussi entendent le ressenti des femmes qui marchaient et qu'ils comprennent », souligne Charline.

Selon la jeune femme, les villes devraient être pensées de manière globale : 

« On parle trop de l’insécurité. C'est une thématique essentielle mais qui pourrait se traduire à travers d’autres politiques transversales. C’est l’occasion de parler des transports, de l’appropriation des rues, des loisirs, du sport... C’est en pensant cette ville de manière globale que l'on pourra permettre une meilleure appropriation par les femmes. » 


Voici trois idées, parmi tant d'autres, qui permettraient aux femmes de se sentir mieux dans la ville.


Taguer les murs de graffs et de punchlines féministes

En plus de donner une voix artistique aux femmes, l’enjeu avec les graffitis est aussi de décorer les villes, de les rendre plus colorées et peut-être même de mêler ça à une action plus globale comme le tourisme. « A Philadelphie, il y a énormément de muraux avec des balades urbaines à faire, qui racontent tous une histoire », explique Charline.

 « A Budapest, une femme organise des "tour bus" féministes, un circuit dans un bus qui met en avant les femmes ayant participé à la construction de la ville. »

Lier le street art et l'histoire de la ville pourrait ainsi être un axe intéressant vers la réappropriation de la ville par les femmes. 


Mieux mixer les espaces de loisirs et de sport

Aujourd’hui, plusieurs études montrent que 75% des stades sont occupés par des hommes. Non pas que les filles ne veulent ou ne peuvent pas jouer aux foot, mais la gent masculine semble avoir la mainmise sur les terrains, explique Charline. 

Pour remédier à ce problème, le Japon notamment, a mis en place un système d’horaires réservés hommes-femmes et encouragent les équipes mixtes. 

A Malmö en Suède, un soir par semaine, un skatepark est réservé aux jeunes filles.

 « L’idée n’est pas d’exclure les garçons mais de les aider à prendre d’avantage confiance, elles qui n’osaient pas venir les autres jours par peur de railleries et de moqueries », confie Charline. 


Accentuer la présence des femmes dans la rue

Se réapproprier l'espace public en y faisant de simples activités fait également partie des solutions potentielles. Charline prend l'exemple de la Chine où les femmes dansent et font du sport dans la rue de manière spontanée. « Elles font leur taïchi dans la rue et ça ne pose aucun problème. C'est complètement naturel et elles ne sont pas du tout stigmatisées. Le trottoir est à tout le monde. » 

Il suffirait ainsi de petites actions pour se sentir un peu plus libre. Selon Charline, « quand on s'approprie l’espace public, on peut régler certains problèmes d’insécurité »

Que va donc faire l'association de toutes ses données récoltées ? Actuellement en phase d'analyse, un rapport avec une idée sur chacune des thématiques est en train d'être rédigé, et sera ensuite présenté à la Ville de Paris. A voir ce qu'il en adviendra !