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Un peu d'Histoire, ça fait pas de mal, du coup on a demandé à Raconte-Moi l'Histoire de nous faire quelques petits textes sur les anecdotes parisiennes, allant de trucs sympas à d'autres un peu plus glauques mais toujours aussi chouettes à lire ! Retour avec elle sur la légende cannibale du barbier et du pâtissier de l'île de la Cité.
Tu savais toi que Tim Burton a pu s'inspirer d'une légende médiévale pour son film "Sweeney Todd" ? Sweeney Todd, c'est le barbier (Johnny Depp) qui découpe ses clients pour offrir de la bonne chair fraîche à sa femme (Helena Bonham Carter), lui permettant ainsi de faire les meilleures tourtes de Londres. Cette histoire prend racine autour de la légende d'un barbier et d'un pâtissier célèbres de l’île de la Cité au XIVe siècle.
Un commerce florissant
En 1387, à Paris, si tu veux manger les meilleures tourtes de la ville, il te faut te rendre à l'angle de la rue des Marmousets et de la rue des Deux-Hermites, dans une petite pâtisserie qui ne paie pas de mine. La réputation de l'artisan n'est plus à faire. C'est bon, c'est même excellent, et il faut venir bien tôt le matin pour pouvoir espérer manger une tourte à midi. Avec un verre de pinard, ça passe nickel ! On raconte que même le roi Charles VI en est très friand. La bonne nouvelle ! Ça ne fait qu'augmenter les ventes. Eh oui, du moment qu'un membre de la famille royale apprécie quelque chose, la cour se rue dessus, et le menu peuple tente de suivre. D'ailleurs, deux chanoines du chapitre de Notre-Dame se décident un jour à aller acheter deux de ces célèbres tourtes. C'est pas tellement respectueux des règles, mais bon, y'a pas de mal à se faire du bien, ils iront se confesser.
La disparition de Gunthar* (rassurez-vous, on le retrouve) *Parfois, nommé Alaric
De bon matin, les deux hommes se retrouvent face à la devanture, mais ils ne sont pas seuls. Il y a un chien qui aboie. Genre pas qu'un peu. Il est vraiment vénèr et aboie, grogne et pleure depuis des heures. Le voisin barbier lui jette des pierres pour le faire fuir, et le pâtissier a bien essayé de le chasser avec un bâton. En vain. Les chanoines tentent bien de le calmer en lui donnant un morceau de pain, mais rien n'y fait. Aussi, Frère Martin semble-il reconnaître l'animal. C'est celui d'un jeune homme qu'ils accueillent depuis plusieurs mois, Gunthar. Un mec à l'accent germanique, pas méchant pour un sou. Les moines vont hâter le pas afin de retrouver Gunthar et lui demander de récupérer son iench, qu'ils pensent tous possédé. Arrivés à Notre-Dame, pas de Gunthar. À midi, toujours pas. En fin d'après-midi personne. Début de soirée non plus. Les deux compères décident alors de partir à sa recherche.
En passant dans la rue des Marmousets, le chien est toujours là, il couine, il geint, bref, il emmerde tout le monde. Frère Martin s'arrête lui donner une caresse et aperçoit une lumière dans la pâtisserie. Quelqu'un a dû oublier d'éteindre la cave. Il frappe à la porte. Personne ne répond. Et puis il entre. Moi perso, dans un climat pareil de chien qui hurle, de mec qui disparaît subitement et en pleine nuit dans une petite rue au XIVe siècle, je serais rentrée chez moi. Direct. Mais à chacun sa dose de témérité.
Martin entre et soulève une petite trappe qui mène au sous-sol. Bim. Il tombe nez à nez avec le pâtissier et le barbier d'à côté. Couverts de sang. Il sont en train de dépecer une carcasse. Une carcasse humaine. L'horreur. Ni une ni deux, le courage disparaît et les frères se cassent rapidos se mettre à l'abri. Ils interpellent ensuite une patrouille de guet. Le barbier et le pâtissier vont être arrêtés et vont être jugés. Enfin jugés, c'est vite dit. Ils sont coupables, alors ça va vite. Faut pas chipoter. On les fout dans des cages en fer, et on les brûle sur la place de Grève (l'actuelle place de l'Hôtel de ville). Oui oui, on leur fout le feu.
Le duo de choc
Les deux voisins avaient trouvé une bonne combine, le barbier (à forte tendance serial killer) sélectionnait un de ses clients de passage, le rasait de près, encaissait son argent. Et puis... Il l'égorgeait dans sa cave. Ensuite, les deux copains s'organisaient des petites soirées découpage de chair fraîche et le pâtissier pouvait faire les meilleures tourtes de la ville. Faut dire que la viande était bien tendre. C'est une chanson populaire qui a rendu l'histoire si célèbre : "Et rue des Deux-Hermites, proche des Marmousets, fut deux âmes maudites, par leurs affreux forfaits, l'un barbier sanguinaire, pâtissier téméraire, découverts par un chien, faisant manger au monde, par cruauté féconde, de la chair de chrétien."
Depuis la fermeture des deux commerces, le quartier est plus tranquille mais on mange moins bien à Paris...
Si lors d'une promenade sur l’île de la cité, tu cherches à retrouver le lieu du crime, il te faut aller rue Chanoinesse. Au XIXe siècle, Haussmann a fait sauter la rue des Marmousets, trop étroite, trop insalubre. Trop de mauvais souvenirs peut-être.
Pour lire plus d'Histoire, d'ici et de là-bas, d'hier et d'il y a 150 piges, rendez-vous sur le site de Marine qui nous fait quand même mieux aimer l'Histoire que Madame Durand qui nous a saoulés toute l'année de 4e.