A Beautiful Day : le nouveau Taxi Driver, vraiment ?

undefined 9 novembre 2017 undefined 12h35

Louis Haeffner

Annoncé comme « le Taxi Driver du XXIe siècle » par l'affiche officielle, j'étais assez curieux de voir si Joaquin Phoenix, que j'adore, ferait aussi bien que Robert De Niro et si, plus généralement, la comparaison entre les deux films avait réellement lieu d'être. Je vous le donne en mille, A Beautiful Day est un bon film par bien des aspects, mais on est très loin du chef-d'œuvre de Scorsese, évidemment. 


Commençons par le commencement : déjà, pourquoi diable avoir renommé You Were Never Really Here (version anglophone) en A Beautiful Day (version française), sachant que ces deux versions présentent un titre en anglais. Y'a que moi que ça choque ? Le pire, mais vous ne le saurez qu'en allant le voir, c'est que le titre original apporte du sens au film, quand le titre français ne fait que brouiller les pistes. Bref, passons.

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Joe est un gros gars hyper balèze, apparemment rompu au corps à corps, et qui ne semble pas avoir beaucoup de problème avec la violence. On imagine qu'à son retour d'Afghanistan, il a eu du mal à se réintégrer dans une société qui le rejette (premier commun avec Taxi Driver), et que le seul moyen qu'il a trouvé pour subsister, c'est accepter des "missions" de type expédition punitive. A l'occasion d'une de ces missions, il sauve une gamine (deuxième et dernier point commun avec le film de Scorsese), fille d'un sénateur, ce qui le placera au centre d'un vaste réseau d'exploitation sexuelle de mineurs. Ce mec un peu perdu et bourrin, c'est le héros de notre histoire, incarné comme toujours avec brio par Joaquin Phoenix. Pour le coup, le bonhomme mérite carrément son prix d'interprétation masculine à Cannes, mais ce n'est une surprise pour personne, plutôt une sorte de couronnement bien mérité. 

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Pour ce qui est du prix du scénario par contre, j'ai plus de mal à comprendre, même si certaines associations d'idées et d'images revêtent une forme d'interprétation lynchéenne très intéressante. On comprend que Joe a vécu un épisode traumatisant lors de son enfance grâce à de réguliers flashs, introduits de façon plutôt brutale dans le cours du récit. Ce procédé, qui relève plus de la mise en scène que du scénario d'ailleurs, est remarquable par la puissance associée des images et des sons, et rend le métrage véritablement immersif, faisant de la violence le véritable sujet du film. Chaque coup porté, chaque souvenir évoqué, aussi bref soit-il, est une épreuve douloureuse pour le spectateur. Hyper bien foutu. 

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A Beautiful Day est donc un film intéressant pour le côté vivace de l'expérience ciné qu'il propose. La réalisation, innovante et sensorielle, et l'interprétation exceptionnelle de Joaquin Phoenix lui donnent des qualités certaines, mais le film souffre, bizarrement, de sa commercialisation. Taxi Driver ? presque rien à voir. Prix du scénario ? quelle étrange idée. Changer le titre ? n'en parlons plus... 


A Beautiful Day
, de Lynne Ramsay

Avec Joaquin Phoenix
En ce moment en salles