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Le non-consentement entre dans la loi française sur le viol et les agressions sexuelles

undefined undefined 30 octobre 2025 undefined 13h00

Jérémy Pennors

C’est une phrase qui change tout : « Constitue une agression sexuelle tout acte sexuel non consenti ». Ce mercredi 29 octobre, le Parlement a définitivement adopté la proposition de loi portée par les députées Marie-Charlotte Garin (Écologiste) et Véronique Riotton (Ensemble pour la République, égelement présidente de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée Nationale), inscrivant noir sur blanc la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol et des agressions sexuelles

Une réforme saluée comme « une victoire historique » par ses autrices, soutenue par une large majorité des élus et par le gouvernement. En quelques lignes, le droit français rejoint celui de pays comme la Suède, l’Espagne ou le Canada, où le principe « sans consentement, c’est un viol » est déjà inscrit dans la loi

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Une révolution juridique et symbolique

Le consentement sera désormais défini comme « libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable ». Autrement dit : un « oui » doit être donné sans contrainte, et peut être retiré à tout moment. Le texte précise également qu’il ne peut être déduit du silence ou de l’absence de réaction de la victime, une avancée majeure dans un système judiciaire souvent accusé d’interpréter le non-consentement de manière trop restrictiveEn d’autres termes : le « non » n’a plus besoin d’être crié pour exister. 


Quand la loi dit (enfin) que sans oui, c’est non

« Quand vous ne dites pas oui, c’est non. Quand vous dites oui parce que vous avez peur, c’est non. Le seul oui qui vaille est un oui libre ». Ces mots de la sénatrice Mélanie Vogel résument l’esprit de cette réforme : faire évoluer la loi, mais aussi les mentalités. Une manière de renverser la logique : jusqu’ici, le viol devait être prouvé par la contrainte, la menace ou la violence. Désormais, c’est l’absence de consentement qui devient le cœur de la définition. 

Certaines voix restent cependant critiques : la sénatrice socialiste Laurence Rossignol regrette par exemple le terme « consentement », qu’elle juge trop passif, préférant parler de désir ou de volonté. Mais pour la majorité des parlementaires, cette réforme constitue un changement de paradigme, salué comme une victoire féministe et juridique.


Seul le Rassemblement national s’y est opposé

Si la réforme a été adoptée à une large majorité (155 voix contre 31 à l'Assemblée Nationale), le Rassemblement national est le seul parti à s’y être opposé. Sa députée Sophie Blanc (Pyrénées-Orientales) a estimé que ce texte risquait de « déplacer le débat judiciaire » en obligeant les avocats à « disséquer les gestes, les mots, le silence » plutôt que de juger la violence du coupable.

Une position isolée, critiquée jusque dans les rangs de la droite modérée, qui y a vu un refus d’avancer sur la reconnaissance des violences sexuelles.


Un changement de loi, et après ?

Pour Lola Schulmann, d’Amnesty International France, cette avancée « ne fait pas office de baguette magique », mais elle est essentielle pour faire évoluer les mentalités et encourager les victimes à parler. La Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles insiste de son côté sur la nécessité d’accompagner cette réforme par une éducation à la vie affective et sexuelle, et par une formation des magistrats et policiers.

Car si la loi change, la société doit suivre : l’adoption de ce texte ne se limite pas à un article du code pénal, c’est un signal fort envoyé à toutes les victimes, et un rappel collectif que le respect du consentement est la base de toute relation. 

Le président de la République dispose désormais de quinze jours pour promulguer la loi. Pendant ce délai, le Conseil constitutionnel peut être saisi par 60 députés ou sénateurs. Si le texte est validé, il sera ensuite directement publié au Journal officiel.

A noter enfin que cette nouvelle définition ne s’appliquera qu’aux faits commis après sa promulgation, conformément au principe de non-rétroactivité du droit pénal, inscrit dans la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Autrement dit, les affaires déjà jugées ou en cours ne seront pas concernées par cette nouvelle définition.