Nouvelle intervention anti-crack à Paris : quelles suites ?

undefined 5 octobre 2022 undefined 15h27

Auriane Camus

Une victoire pour les riverains du square Forceval. Ce mercredi 5 octobre, 1000 policiers ont été mobilisés pour démanteler le campement de la Villette, dans le 19e. Présents depuis plus d’un an, près d’une centaine de consommateurs de crack ont été délogés aux environs de 7 heures du matin. Un dispositif de police est d’ores et déjà mis en place pendant plusieurs jours, afin d’éviter une reformation du campement dans le parc.


Des riverains qui restent dubitatifs

Les habitants du quartier de la Villette se plaignent de la situation depuis le déplacement, il y a un an, de dizaines de toxicomanes au sein du square. En septembre 2022, plusieurs centaines de personnes, dont une majorité de riverains, avaient manifesté pour demander une intervention des forces de l’ordre. L’association Villette Village avait même déposé un recours collectif auprès du tribunal administratif de Paris, afin que l’État et la Ville versent aux riverains 100 000 euros en réparation des préjudices subis.

Bien qu’une majorité d’entre eux soient soulagés de voir enfin le square Forceval évacué, certains habitants présents sur place restent néanmoins dubitatifs face à l’opération, selon le Parisien. « On demandait une évacuation avec une mise à l’abri des personnes, s’inquiète déjà Raphaël, habitant de Pantin et membre du collectif Anti-Crack 93. On a cru comprendre qu’il y avait quelques places d’hébergement. Mais pas suffisamment. Ça nous laisse dubitatifs pour la suite. »


Quelle suite pour le camp du crack ?

Si les consommateurs de crack ont squatté le square Forceval depuis plus d’un an, c’est parce que ces derniers avaient déjà été virés de la place Stalingrad, à la frontière entre le 10e et le 19e, le 24 septembre 2021, pour être évacués près de la Porte de la Villette. Comment s’assurer qu’un campement ne se reforme pas à nouveau dans le 19e ?

Sur Twitter, le ministre de l’Intérieur écrit que « 1000 policiers seront déployés afin que ce campement ne se reconstitue pas ailleurs ». Mais les arguments de Gérald Darmanin n’ont visiblement pas fait l’unanimité. Anne Souyris, adjointe à la Mairie de Paris chargée de la santé publique et environnementale, est loin d’être convaincue : « Et rebelote. Pourquoi recommencer le même processus : évacuer sans solution construite de prise en charge préalable ? Comment penser que ces usagers de drogues en déshérence sociale ne vont pas se retrouver entre Stalingrad et halls d’immeuble ? »

Même du côté des acteurs de l’opération, le doute est semé. Toujours selon le Parisien, un policier affirme que « rien n’a été prévu pour [les consommateurs] si ce n’est une surveillance pour éviter qu’ils ne se réinstallent ailleurs, ce qui est pourtant inévitable ».


Une prise en charge médico-sociale inexistante

Selon les dires des services de l’État, l’opération serait en préparation depuis plusieurs semaines. Après l’évacuation, des contrôles doivent être réalisés auprès des consommateurs. Les étrangers en situation irrégulière seront ainsi expulsés, tandis que les personnes recherchées par la police seront poursuivies par la justice. Pour les autres, des lits médicalisés auraient été ouverts au sein d'établissements de l’AP-HP pour une prise en charge médicale.

Néanmoins, des membres de Médecins du Monde regrettent de ne pas avoir été contactés par la préfecture de police et regrettent la mise en place d’une « réponse sécuritaire, pas sanitaire ». Marie Debrus, référente technique et spécialiste des questions de réduction des risques en matière de drogue à Médecins du monde, ajoute : « On en est exactement au même point que l’année dernière. Les acteurs de terrain ont pourtant récemment produit un rapport avec un ensemble de solutions. Nous attendons maintenant des moyens concrets pour les mettre en place ».

Sur Twitter, Bastien Lachaud, député de Seine-Saint-Denis, déplore un manque de « solutions durables pour la sécurité et l'accompagnement médico-social »De son côté, l’Etat se défend en plaidant la mobilisation d’un dispositif bien plus important que pour les démantèlements précédents. En attendant de voir l’évolution de la situation, des agents du service propreté de la Ville sont sur place pour remettre les lieux en état.