La petite histoire du pastaga

undefined 11 mai 2016 undefined 02h00

Hillel Schlegel

Salut à toi, jeune coquin. Alors que les beaux jours reviennent, rien de tel qu'un petit jaune en terrasse, n'est-ce pas ? Jeudi 19 mai, c'est d'ailleurs le coup d'envoi du Tournoi Jaune, le grand tournoi de baby-foot inter-quartiers organisé par Le Bonbon qui est, comme son nom l'indique, totalement pastis-friendly. A cette occasion, on a pensé te rappeler ce qu'il y a en réalité dans ton verre quand tu te commandes ton pastaga au PMU du coin. Parce qu'on sait bien que tout(e) imbibé(e) que tu es, tu n'as aucune idée de ce que tu bois, heiiin, heiiin ?

 

L'histoire du pastis commence par deux interdictions : celle des boissons de plus de 16° en 1914, et celle de l'absinthe en 1915. Deux décrets qui visent à limiter les ravages de la "fée verte" dans nos campagnes. Du coup, pendant la première Guerre Mondiale, tout ce qui ressemble de près ou de loin à de l'absinthe est interdit en France. Mais la loi est floue en ce qui concerne les boissons à base d'anis. Wikipédia nous apprend qu'en "1920, l'État autorise à nouveau la production et rétablit l'autorisation des consommations anisées dont le degré d'alcool est inférieur à 30°. Puis, en 1922, le degré est relevé à 40°." C'est alors qu'en Provence, où le pastis coule dans chaque bar, les marques de pastis se multiplient, chacune ajoutant à l'anis "d'autres plantes aromatiques telles que le fenouil, l'anis vert, la réglisse, etc.".

 

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Ainsi, on apprend ici qu'à l'époque, "autour de Marseille, la tradition de l’apéro est bien vivante : eau fraîche, anis et réglisse se marient et s’enrichissent d’autres macérations de plantes aromatiques, à base de badiane et de réglisse (anis étoilé plutôt qu’anis vert)". Les préparations anisées se multiplient donc en toute illégalité. Le pastis est déjà constitué en tant que boisson bien connue : c'est le résultat de l'aromatisation d'un alcool neutre d'origine agricole, avec des extraits d'anis vert, d'anis étoilé, de fenouil, ou de toute autre plante contenant le même constituant aromatique principal, ainsi que par des extraits naturels issus du bois de réglisse. C'est en 1932 que Paul Ricard crée sa recette à base d'anis étoilé, d'anis vert et de réglisse dont le succès ne se démentira pas. Pernod, qui est sur le marché depuis le XIXème siècle, riposte en 1938 avec son Pernod 45 (tiré du degré d'alcool), puis son Pernod 51 (tiré de l'année de sa création, 1951), qui sera rebaptisé par la suite Pastis 51, enterrant le Pernod 45 qui prêtait à confusion. Enfin, en 1975, les deux marques fusionnent, donnant naissance au géant international du pastis qu'on connaît aujourd'hui : la maison Pernod-Ricard. Leur principal concurrent en matière d'apéritif anisés reste, très loin derrière, l'enseigne marseillaise Casanis.

 

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Oui, c'est bien Snoopy, et ce geste est documenté ici.

 

LE SAVIEZ-VOUS ? Pourquoi le pastis est-il jaune ? En réalité, la couleur du pastis lorsqu'on le mélange avec de l'eau est liée à un colorant, le plus souvent du caramel. Sans cela, le pastis resterait naturellement incolore mais deviendrait quand même trouble, puisque cela est dû à l'éthanol, peu soluble dans l'eau. Il le redevient d'ailleurs lorsqu'il est particulièrement frais ou qu'on le laisse reposer longtemps. Il existe ainsi des pastis d'autres couleurs, notamment le pastis bleu, tel qu'on peut le trouver en Californie !

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LES ANECDOTES DE L'INTERNETZ

  • *Contrairement à ce qu'on pourrait croire, c'est la région Nord qui consomme le plus de pastis, loin devant le PACA.
  • *Fernandel disait à propos du pastis : "c'est comme les seins - un c'est pas assez, trois c'est trop."
  • *Quant à Gainsbourg, il avait apparemment l'habitude de commander "un 102". Deux verres de 51, on l'aura compris...
  • *Il semblerait d'ailleurs qu'il existe en prison la technique de la serviette au pastis : on fait passer au détenu une serviette trempée dans du pastis (incolore donc, tant qu'il n'est pas mélangé avec de l'eau). Il lui suffit de la passer sous l'eau par la suite et hop, apéro.
  • *Pétain souhaitait lutter contre le Pastis et les boissons trop alcoolisées car il attribuait la défaite à... "la France de l'apéro". Enfin bon, c'est surtout qu'en face, ils avaient déjà du proto-Captagon et des bonnes petites Kampfdrogen, n'est-ce pas.
  • *En Provence, on peut commander une "momie" ou "mominette" : un petit jaune dans un petit verre (2 cl).
 

Last but not least : Wikipédia liste plus de 30 cocktails à base de pastis. On imagine bien que la liste n'est pas exhaustive, mais elle comporte déjà quelques noms amusants : le perroquet, le lama, le mazout, le diesel...

 

A la vôtre les alcoolos !