Rock\'n Roll : de qui se moque-t-on ?

undefined 16 février 2017 undefined 00h00

La Rédac'

Après une intense période promotionnelle, où Guillaume Canet semblait à tout prix vouloir faire corps avec son personnage (lui-même en fait), et une bande-annonce plutôt alléchante, j'étais aussi plein d'a priori que curieux de découvrir le film. J'avais la réelle volonté, en tout cas, de laisser une chance au rire. Bien mal m'en a pris : j'ai très peu ri, et j'ai même plutôt eu l'impression qu'on me prenait pour un con. 


J'avoue que je suis assez énervé. De quel droit les médias à tendance pop culture envahissent-ils ma timeline facebook avec une tonne d'articles dédiés aux photos Instagram de Guillaume Canet qui montre Marion Cotillard en pyjama en nous faisant croire que c'est cool, ou même drôle, le tout pour la promotion d'un film du même Guillaume Canet ? On n'est pas obligé de lire le papier, allez-vous me dire. C'est vrai, mais on n'est pas obligé d'aller voir son film pourri non plus, du coup. Cette promotion ne fut au final qu'un grand moment de démagogie mal placée, puisque comme le film, elle exploita les plus bas instincts de notre société, ceux-là même qui permettent à des émissions comme Les Marseillais à Cancun d'exister : le voyeurisme et le "célébritisme" (intérêt démesuré pour les célébrités, pour le simple fait qu'elles le soient). En faisant un film dont le succès recherché se base là-dessus, Guillaume Canet, qui est quelqu'un d'intelligent, plutôt que de dénoncer cet état du monde, en profite lâchement. Le cinéma est un art, et l'art est fait pour élever l'esprit via la beauté, et non pour s'en foutre plein les fouilles en exploitant la bêtise des bonnes gens. Guillaume Canet semble l'avoir oublié, et je lui en veux. 

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Mais parlons plus en détails du film. La première partie est drôle par moments, et j'étais content de le reconnaître. Après tout, je vais au cinéma pour me faire plaisir, pas pour déverser gratuitement mon fiel sur les efforts laborieux de productions à visée populaire. Ce serait extrêmement pédant et injustifié, n'ayant moi-même jamais réalisé le moindre morceau de film. Quelques grosses barres de rire donc, mais pour des blagues plutôt faciles et des répliques impliquant le mot « couille » dont j'ai oublié la teneur exacte, pardonnez-moi. En gros Guillaume (lui-même, donc, mais fictionnel) se rend compte qu'il n'est plus cool du tout, et que sa vie bien rangée lui donne une image de gendre idéal qu'il refuse.

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Lui n'a que 42 ans, il veut encore être dans le coup, faire des rôles "physiques", se bourrer la gueule, se droguer, baiser des meufs toussa toussa. C'est là que tout part en vrille. Le personnage ringard et avide de rock attitude qu'il devient est si caricatural qu'il en devient ridicule, pour un traitement de la crise de la quarantaine grossier et dénué de toute finesse. On a affaire en gros à un ado qui change de style vestimentaire. Aucune nuance, aucune subtilité, Guillaume passe de Guillaume Canet à un gros blaireau qui perd totalement les pédales, se ridiculise tout seul sur internet et transforme un trait de coke en AVC. Quelques gags viennent rendre tout ça joyeusement risible, et on kiffe se foutre de sa gueule, on dirait presque de l'autodérision. Pourquoi pas.

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Commence alors la deuxième partie, et avec elle la catastrophe qu'on osait à peine imaginer. Guillaume s'isole, se met à la muscu protéinée, commence à faire de la chirurgie esthétique pour paraître plus jeune, se sépare de Marion qui ne le comprend pas. Un processus de déviance qui s'achèvera par une transformation physique étonnante : l'acteur ressemble désormais à Grichka Bogdanof sous stéroïdes, on n'y croit pas une seconde, bien évidemment, et c'est gênant. Dès lors, on comprend mal ce qu'a voulu faire Guillaume Canet. Si le but était de faire une comédie à l'américaine, dans la démesure et le ridicule, pétrie de clichés plus gros les uns que les autres, c'est loupé et il faut laisser ça aux ricains, absolument. Si le but est de nous faire comprendre que la chirurgie esthétique c'est mal et donc quà trop vouloir contrôler son image on perd le contrôle de sa vie, c'est loupé aussi puisque Marion revient à la fin, en chantant, et que bordel t'as basé tout ton film et ta promo sur ta propre image !

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En fait, quoi qu'il ait voulu faire avec ce film, c'est loupé. Prendre le public français pour une bande d'attardés incapables de la moindre finesse d'esprit et réclamant du lol facile, par contre, c'est réussi, mais c'est mal le connaître. Bravo Guillaume Canet, et vive le cinéma français !


Rock'n Roll
, de Guillaume Canet

Avec Guillaume Canet, Marion Cotillard
En ce moment en salles